Ed. ÉRÈS Collection poche-société Septembre 2011, 143 pages, 12 € Cet ouvrage présente de façon synthétique, en les recoupant par thèmes et approches, la plupart des travaux qui, depuis vingt ans, ont cherché à rendre compte des usages des technologies de communication, c'est-à-dire des objets, outils et dispositifs techniques permettant une interaction à distance et une réciprocité dans la communication, tels Internet et le téléphone portable.
Les conduites de déconnexion apparaissent comme une volonté de maîtrise des technologies de communication. Elles sont toujours ponctuelles et la plupart du temps partielles. Il s’agit de ne pas se laisser envahir par trop d’informations non désirées, d’échapper à un mode d’interpellations incessantes, à l’urgence et à la pression managériale, au contrôle hiérarchique ou à l’impression d’être surveillé. La déconnexion équivaut alors à reprendre souffle et distance, à retrouver son rythme et un temps à soi. Mais elle est aussi parfaitement révélatrice de la figure de l’homme hypermoderne qui ne se contente pas de suivre l’accélération du mouvement moderne (capacité instrumentale à agir rationnellement sur le réel et soif d’inédit et de changement), mais l’interroge au contraire par une réflexivité accrue sur ses choix et dans l’inquiétude qui en résulte.
une possibilité inédite d'expérimentation de soi L'un des aspects les plus novateurs d'Internet est sans doute de permettre des échanges faisant fi de toute implication physique. Pour la première fois dans l'histoire de la communication humaine, il est en effet possible d'« aborder » de parfaits inconnus et de discuter avec eux de façon entièrement anonyme, désincarnée et synchrone 2. Certes, les échanges épistolaires impliquent une certaine forme de désincarnation, mais ils sont toujours asynchrones. De leur côté, les dialogues téléphoniques sont simultanés, mais les voix « trahissent » souvent les interlocuteurs : par exemple leur sexe ou leur émotion. De nombreux cadres d'échange autorisent par ailleurs l'anonymat, mais ces cadres sont toujours situés. En regard de ces types d'échanges désormais « classiques », Internet ouvre des « espaces » physiquement non situés, dans lesquels peuvent se déployer des échanges anonymes entre individus désincarnés. Ce relatif « décollement » des internautes en regard des lieux, corps et statuts va permettre l'apparition d'un type d'action totalement inédit : celui de la manipulation identitaire à laquelle un individu va pouvoir se livrer en superposant une identité virtuelle à son identité réelle, une identité fantasmée à son identité sociale.
La nature des réactions à l'usage des téléphones mobiles dans un lieu public permet de qualitativement désigner ce lieu selon un mode de catégorisation inédit. Plus ces réactions seront nombreuses et négatives, et plus la réputation du lieu renverra à une civilité sensible, à une attention partagée, à une atmosphère de sympathie sociale, à une ambiance positivement vécue, bref au plaisir de goûter au lien social en public. Le mode « d'être-ensemble » dans ces lieux relèvera alors, au mieux d'une urbanité exquise et au pire d'une civilité appréciée. À l'inverse, moins les réactions seront nombreuses et impérieuses, et plus la réputation du lieu renverra à sa simple disposition fonctionnelle, à une approche instrumentale de ses services, à une vision utilitariste de ses ressources, à une relation concurrentielle avec ceux qui le fréquentent, bref à la nécessité de les pratiquer selon une logique utilitariste. Le mode « d'être-ensemble » dans ces lieux relèvera alors, au mieux d'un ajustement bien compris, au pire d'une brutalité urbaine.
Cet article rappelle comment la sociologie des usages des technologies de communication a d’abord, en réhabilitant les usagers dans leur dimension d’acteurs, permis de s’extraire de simples études d’impact des technologies sur le social, puis a conduit, au moins en partie, à une sociologie de l’expérience. À son tour, cette dernière pose concrètement la question de savoir comment et dans quelle mesure, dans un monde où ces technologies irriguent désormais la quasi-totalité de la surface de nos vies, l’individu contemporain en reste encore maître. En particulier, la question de l’autonomie du soi-sujet (réflexif et en retrait) en regard du soi-objet (constamment pisté, calibré et métabolisé en un ensemble d’indicateurs par le biais de ces mêmes technologies) est posée, lançant ainsi à la sociologie le défi de rendre compte de ce qui semble être l’un des enjeux centraux de la société hypermoderne.This article explores how the sociology of the usage of communication technologies first emerged as an outcome of simple impact studies into the effect of technologies on society to become, at least in part, a sociology of experience.In turn, the latter deals specifically with the question of how and to what extent, in this world where these technologies irrigate nearly the totality of the surfaces of our lives, the contemporary individual stays in control.In particular it poses the question of the autonomy of the self-subject (reflexive and in retreat) regarding the self-object (constantly tracked, calibrated and metabolized through an ensemble of indicators from those self same technologies). As a consequence it challenges sociology to deal with one of the central issues of the hypermodern society.Este artículo evoca como la sociología de los usos de las tecnologías de comunicación tiende desde un principio a la recuperación de los usuarios dentro de su dimensión como actores, permitiendo extraer a partir de estudios simples el impacto de las tecnologías sobre lo social, para luego conducirse, al menos en parte, hacia una sociología de la experiencia. A su turno, esta última, propone concretamente la pregunta sobre cómo y en qué medida en nuestro mundo, donde las tecnologías riegan casi la totalidad de las superficies de nuestras vidas, el individuo contemporáneo es aun dominador. En particular, la pregunta sobre la autonomía de sujeto-en sí (reflexivo y en retirada) observado por el objeto – en sí (constantemente vigilado, calibrado y metabolizado en un conjunto de indicadores a través de las mencionadas tecnologías), es poseído, lanzando así a la sociología al desafío de dar cuenta de lo que parece ser un de las cuestiones centrales de la sociedad hipermoderna
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