Pascale.Hadermann@ugent.be, Ariane.Ruyffelaert@ugent.be
IntroductionLes langues naturelles ont développé un vaste répertoire de moyens pour exprimer la temporalité, tels que les catégories verbales du temps et de l'aspect, les caractéristiques sémantiques temporelles inhérentes au verbe (et à ses compléments), les expressions périphrastiques du type commencer à, continuer à, se mettre à, être en train de + infinitif, des compléments adverbiaux exprimant le temps, la durée et des principes d'organisation discursive comme le Principe de l'Ordre Naturel (voir entre autres Klein 1994). Confronté avec cette kyrielle de moyens linguistiques, tout locuteur aura un long trajet à parcourir avant d'arriver à la maîtrise complète de l'expression de la temporalité et ceci est sans doute d'autant plus vrai lorsqu'il s'agit de s'approprier ce système dans une langue étrangère qui est typologiquement distincte de la langue source (voir entre Les temps verbaux constituent un des paradigmes qui se prêtent le mieux à l'observation des divergences intersystémiques et de leur impact au niveau de l'expression de la temporalité. Pour comprendre les processus acquisitionnels de ces temps verbaux et l'éventuel effet de la proximité entre langues source et cible, il est intéressant de comparer des interlangues d'apprenants ayant des langues sources issues de familles linguistiques différentes (par ex. le néerlandais et l'espagnol) mais dont une appartient au même groupe que la langue cible (par ex. le français, langue romane tout comme l'espagnol). Il se pourrait que, pour les apprenants hispanophones, l'acquisition des temps verbaux se déploie autrement car, à quelques exceptions près, le système verbal de l'espagnol est très proche de celui du français (Noyau & Vasseur 1986, Starren 2001, Benazzo 2007, Amenós 2010. L'objectif de notre contribution est d'analyser comment des apprenants néerlandophones et hispanophones du français langue étrangère (FR L2) acquièrent la temporalité -plus spécifiquement la référence au passé -et de vérifier dans quelle mesure leurs interlangues se rapprochent de la langue cible ou, au contraire, reflètent de manière plus ou moins fidèle des mécanismes propres à la langue maternelle (L1). Afin de dresser une image aussi complète que possible, nous présenterons d'abord brièvement les notions essentielles à notre étude ( §2) ainsi que nos hypothèses de recherche et nos données ( §3). Nous adopterons, dans notre description, une approche multifactorielle qui intègre l'analyse de différents moyens linguistiques -morphologiques, lexicaux, sémantiques 1 -et qui essaiera de déterminer la raison du choix pour tel ou tel temps verbal du passé ( §4). Pour expliquer ces choix possibles, nous vérifierons les hypothèses de la primauté de l'aspect lexical ( §5) et du transfert de la L1 ( §6). autres
Le temps verbal et le temps référentielLe temps verbal décrit « l'orientation d'un procès par rapport à un repère » sur un axe orienté du passé vers l'avenir (Wilmet 2007 : 68). Il établit un rapport entre le moment de la pa...