Ces « projets culturels porte-drapeaux » ou flagship cultural projects (Bianchini, Dawson et Evans, 1992 ; Voase, 1997 ; Communian, 2014) sont lancés dans l'optique d'affirmer les villes sur la scène internationale (Pfirsch et Reitel, 2014), notamment celles qui, marquées par la crise économique et sociale, cherchent un nouveau destin (Ingallina et Park, 2005). Cette politique est pourtant déjà assez ancienne et trouve notamment ses origines dans la réussite économique des Festival Market Places (Gravari-Barbas, 1998), qui sont de grands projets de reconquête des fronts d'eau délaissés dans les villes nord-américaines menés dès les années 1960 pour y accueillir des activités commerciales, touristiques ou ludorécréatives. À partir des années 1980, les villes anglo-saxonnes commencent à investir massivement dans la construction d'équipements culturels structurants (Voase, 1997), comme le montrent les exemples des métropoles états-uniennes (Grodach, 2010) ou des villes anglaises des Midlands (Wilkinson, 1992 ; Landry, Greene, Matarasso et Bianchini, 1996 ; Landry, 2000). Mais c'est avec le succès du musée Guggenheim implanté à partir 1997 dans la cité sidérurgique de Bilbao que le mouvement s'accélère. La médiatisation de l'antenne du musée d'art moderne et contemporain new-yorkais sur le site d'une ancienne aciérie, ainsi que le projet architectural développé par Frank Gehry, ont stimulé l'économie touristique locale et la poursuite d'un ambitieux projet urbain, contribuant au renouveau de la ville (Gomez et Gonzales, 2001 ; Masboungi, 2001). Les flagship cultural projects se multiplient dans les villes industrielles en crise à l'image de l'Imperial War Museum North à Manchester ou du Musée des Arts Contemporains à Mons (Lusso, 2009). La France n'échappe pas à la dynamique avec les projets d'antenne du Centre Pompidou à Metz (Boquet, 2014) et du Louvre à Lens (Baudelle et Krauss, 2014).