Cet article tente de spécifier les enjeux d’une adaptation du modèle du Processus de production
du handicap (PPH) au vécu de la maladie chronique, et plus spécifiquement du virus de l’immunodéficience
humaine (VIH). Dans cette perspective, un éclaircissement conceptuel est proposé, car le PPH a
principalement été utilisé pour étudier les populations vivant des situations de handicap liées à des incapacités
motrices, sensorielles, intellectuelles ou comportementales. Ce modèle semble toutefois en mesure
de renouveler la lecture de l’expérience spécifique du VIH, et d’aider à saisir autrement les trajectoires de
vie des personnes vivant avec le VIH (PVVIH). En effet, l’infection au VIH, malgré son statut de « maladie
chronique », demeure associée à un risque d’isolement social. Les modifications corporelles induites par la
maladie ou par son traitement confronte les PVVIH au regard de l’autre. Elles exposent à la visibilité du
statut sérologique et, in fine, à la peur de l’exclusion sociale. Dans ce cadre, l’analyse du Processus de
production du handicap peut permettre de comprendre les variations de la qualité de la participation sociale
et d’identifier les phases de vulnérabilité en s’intéressant notamment au rapport au corps induit par
l’infection et les traitements. Cette approche offre l’opportunité d’un nouvel éclairage sur le poids des environnements
sociaux (notamment des dispositifs de prises en charge sanitaire ou d’accompagnement
communautaire) sur les habitudes de vie et l’expérience quotidienne d’un public fragilisé socialement.