Depuis une trentaine d'années, de nouvelles formes de mouvements apparaissent dans nos villes, telles que la glisse urbaine et plus récemment le « parkour » 1 , qui viennent remettre en question la mise en scène et l'aménagement des espaces publics urbains. Ces pratiques se positionnent comme une « contre-culture » 2 1 en cherchant à maîtriser une architecture opprimante. Elles témoignent aussi de l'urgence de donner davantage de place aux corps en mouvement au coeur de nos villes. En effet, c'est la recherche de sensations, de liberté qui nourrit ces nouvelles « cultures urbaines » (glisse urbaine, parkour, etc.) où priment la liberté de mouvement et la recherche d'obstacles à franchir. Le corps, à travers ces activités, retrouve une place centrale qui réaffirme la relation de l'individu à la ville. Du point de vue des aménageurs qui s'acharnent à canaliser le mouvement, à lisser l'espace pour éviter les débordements, ce genre de pratiques est à proscrire car elles ne s'insèrent pas dans la grille des déplacements possibles. En effet, le skater et le traceur donnent à voir l'espace public différemment, tant d'un point de vue matériel qu'idéel. C'est sur l'image du traceur, qui aborde l'espace public au-delà des rues et des places et nous montre de nouveaux chemins plus aériens, que nous allons centrer notre propos. Quelles sont les raisons qui motivent de jeunes adolescents à pratiquer le parkour (Cazenave, 2007) ? Pourquoi cette activité s'est-elle développée dans les banlieues ? Dans cet article, nous avons tout d'abord choisi de présenter la nouvelle pratique du parkour, ses origines, et, ensuite, de révéler l'importance accordée au corps dans la philosophie du parkour ainsi que la liberté de mouvement recherchée par les traceurs dans des espaces qui offrent peu d'attraits (les banlieues ghettos, les tours, etc.). Enfin, nous voulons analyser cette pratique au prisme de l'espace public et de sa mise en scène. Cet article ouvre donc sur une réflexion sur les effets des corps en mouvement dans la ville. Le libre mouvement des corps Géographie et cultures, 70 | 2013 1 Le « parkour » : réaffirmer la place du corps et de l'individu dans l'espace public Origine 5 Le parkour a été mis en place par deux jeunes Français, David Belle et Sébastien Foucan, dans la banlieue parisienne à Lisses et à Évry. Le nom « parkour » vient de l'idée du parcours du combattant, dans la mesure où David Belle (par le biais de son père) s'est inspiré de la méthode naturelle mise en place par un militaire, Georges Hébert, dans l'objectif de développer la force et l'agilité des soldats. Cette méthode a été reprise pour développer les parcours de santé, qui sollicitent différentes capacités du corps (par exemple courir, sauter, grimper et rouler). Dans un premier temps, le parkour s'est développé dans les banlieues dépourvues d'attraits où de jeunes adolescents, en manque d'espace et de sensations, sont devenus des traceurs. Le nom de « traceur », donné aux pratiquants du parkour, provient de l'idée de tracer une trajectoire ; il s'apparent...