Dans le processus de marchandisation du secteur universitaire, à l'oeuvre en Europe depuis le début des années 1980, la quantification joue un rôle central, en établissant des équivalences et des hiérarchies (classements) : elle permet de traiter des universités, des formations ou encore des chercheurs(euses) comme des éléments interchangeables dont la valeur n'est pas intrinsèque mais est déterminée par le rapport de l'offre et de la demande. En nous appuyant sur l'étude de cas d'une université anglaise, nous voulons montrer ici comment marchandisation et quantification vont de pair. Nous montrerons comment les chiffres sont mobilisés par l'État et par la direction de l'université étudiée pour transformer l'enseignement et la recherche en éléments interchangeables, réductibles à un seul ou un très petit nombre de critères pertinents ; et pour donner corps à cette réduction en orientant les pratiques des universitaires. Le caractère performatif de la quantification est ainsi utilisé comme un outil de transformation de la réalité sociale, avec pour finalité la mise en marché du secteur universitaire.
L’analyse qualitative de la grossesse de femmes de milieu populaire permet d’éclairer les dynamiques de classe et de genre relatives à l’avant naissance. Intervenant dans un quotidien structuré par les rapports sociaux, les grossesses jouent le rôle de révélateur de ces rapports. La socialisation de classe, la dynamique de genre au sein du couple, articulée à la subordination dans le rapport salarial, produisent une réaffirmation de la position dominée de ces femmes lors de la grossesse. Leur assignation au maternage et au travail domestique est renforcée, et leur position en tant que travailleuses fragilisée. Cette cristallisation de la domination à l’occasion de la grossesse donne toutefois lieu à une certaine contestation de la part des femmes concernées.
Cadre de la recherche : Dans le contexte français, les grossesses sont encadrées par un ensemble de dispositions légales (droits de la santé, de la sécurité sociale, du travail) et de pratiques médicales (parcours de soins type). Cet article interroge l’encadrement du temps de la grossesse et les tensions entre différentes temporalités. Les femmes enceintes sont assignées à des responsabilités supplémentaires au nom de la « protection » du fœtus qui viennent s’ajouter au travail domestique et, pour nombre d’entre elles, au travail rémunéré. Objectifs : L’article analyse le rôle ambivalent et les effets différenciés de l’encadrement légal et médical des grossesses. Méthodologie : Il s’appuie pour cela sur une enquête par entretiens et observations réalisée en Île-de-France entre 2014 et 2017. Trente femmes enceintes ont été interrogées, dont onze à plusieurs reprises. Les observations concernent différentes étapes du suivi de grossesse à l’hôpital, principalement les inscriptions, les consultations, et les cours de préparation à la naissance. Résultats : L’encadrement des grossesses assigne aux femmes la responsabilité individualisée de garantir la santé du fœtus. Le parcours de soin est intensif et repose sur une disponibilité permanente des femmes, rendue possible par la subordination du temps professionnel aux impératifs médicaux. Les salariées cherchent à minimiser l’impact de leur grossesse sur leur lieu de travail en mettant en œuvre des stratégies de séparation du temps médical et du temps professionnel. Conclusions : L’accès aux soins est largement effectif en France et le droit garantit une couverture médicale pour les femmes enceintes, mais celle-ci ressort en même temps de l’obligation de soins. Cette obligation est inégalement contraignante selon les ressources des femmes. Du côté de droit du travail, les mesures dites protectrices sont peu effectives, car peu appliquées par les employeurs et mobilisées partiellement par les salariées ; celles qui sont le mieux situées dans les rapports de classe et dans la hiérarchie professionnelle ont davantage de marge de manœuvre. Contribution : Cet article contribue à la sociologie de l’articulation des temps sociaux, à la sociologie de la santé, et à la sociologie des inégalités sociales.
scite is a Brooklyn-based organization that helps researchers better discover and understand research articles through Smart Citations–citations that display the context of the citation and describe whether the article provides supporting or contrasting evidence. scite is used by students and researchers from around the world and is funded in part by the National Science Foundation and the National Institute on Drug Abuse of the National Institutes of Health.
customersupport@researchsolutions.com
10624 S. Eastern Ave., Ste. A-614
Henderson, NV 89052, USA
This site is protected by reCAPTCHA and the Google Privacy Policy and Terms of Service apply.
Copyright © 2024 scite LLC. All rights reserved.
Made with 💙 for researchers
Part of the Research Solutions Family.