Une infradanse pour lutter contre la maladie

Abstract

Patrick Germain-Thomas : Dans un premier temps, pourrais-tu parler brièvement de ton parcours professionnel d'artiste chorégraphique ?Christine Graz : Comme beaucoup de petites filles, j'ai pris des cours de danse classique dans mon enfance, notamment à l'école de Lucia Petrova à Lyon, mais j'ai arrêté assez jeune, vers treize ans. À cette époque, dans les années 1970, je ne savais pas que d'autres formes de danses existaient et j'ai donc continué à danser toute seule dans ma chambre sur des musiques de rock'n'roll. Puis j'ai découvert la danse contemporaine et la danse jazz à l'université (en STAPS) avec une professeure qui avait une grande connaissance des techniques de la modern dance américaine et nous en a transmis les sensations internes, à travers des cours mais aussi par une approche créative qui nous permettait d'en saisir les mécanismes. J'étais passionnée par cette approche et, très vite, je n'ai plus fait que de la danse. J'ai passé une audition pour rentrer au Centre national de danse contemporaine d'Angers (CNDC), qui était alors dirigé par Alwin Nikolais 1 . J'ai été reçue et l'enseignement d'Alwin Nikolais m'a mise en relation avec tout un pan de l'histoire de la danse, qui construisait littéralement un sol sous mes pieds. Nous avions des cours de pratique tous les jours, puis des cours d'improvisation qui étaient appelés cours de théorie, une heure d'improvisation chaque jour à partir des notions centrales pour Alwin Nikolais : le temps, la forme, l'énergie et l'espace 2 . Il y avait aussi un cours de composition l'après-midi, pour approfondir ces notions au travers des formes que nous montrions au groupe et au professeur en fin de journée. Nikolais m'a énormément apporté dans une structuration du mouvement, il m'a donné une capacité à savoir exactement ce que j'étais en train de faire et à ne pas subir la danse comme quelque chose d'extérieur, d'imposé. Ensuite, au tout début des années 1980, d'autres moments importants ont été ceux de ma rencontre avec les pratiques asiatiques, avec Min Tanaka et Sankai Juku 3 . Cela a été un bouleversement de perceptions, ces artistes travaillant sur d'autres sensations, d'autres lâcher-prises corporels, des éléments marqués par leur Une infradanse pour lutter contre la maladie Recherches en danse, 11 | 2022