Si les historiens académiques montrent un intérêt croissant pour les environmental studies, on constate symétriquement une recherche de profondeur historique de plus en plus fréquente chez les chercheurs qui s'interrogent sur le lien entre sciences, pratiques de la nature et représentations sociales dominantes. Pour NSS, cette prise en compte de la temporalité représente un défi méthodologique important dans l'éventail des pratiques interdisciplinaires, la temporalité n'étant évidemment pas l'apanage des seuls historiens. La prendre en compte exige toutefois de mobiliser l'un de leurs concepts-clés, celui de « contexte », particulièrement difficile à cerner quand il s'agit, justement, de « nature ». C'est tout l'intérêt de l'article proposé par Pierre-Olaf Schut et Matthieu Delalandre, d'appliquer à l'action en faveur du reboisement du Touring Club au tournant des années 1900 une réflexion sur la genèse des « politiques de la nature » dans une phase historique où la notion d'environnement n'existe pas sous sa forme actuelle, mais s'impose néanmoins comme triple enjeu scientifique, économique et esthétique. La Rédaction Résumé-Le Touring Club de France (TCF) fut créé en 1890 avec pour ambition de développer le tourisme sous toutes ses formes, ce qui impliquait également de préserver les paysages. C'est ainsi qu'au tournant du XX e siècle, le club s'engage dans un combat contre la déforestation et pour le reboisement. L'analyse d'un corpus écrit composé notamment des publications de l'association et des services des Eaux et Forêts permet de mettre en avant la façon dont le TCF s'empare du sujet. D'une part, il fustige les coupes rases ; d'autre part, les bonnes pratiques sont largement mises en avant par la diffusion d'un Manuel de l'arbre, mais aussi par des incitations financières à la plantation d'arbres. Le Touring parvient également, grâce à ses relais au Parlement, à faire évoluer la législation afin d'améliorer la protection des bois et forêts.