Résumé : La satire des mots à la mode s'inscrit dans une longue tradition française. Elle entre dans la presse pendant la Révolution : les journalistes contre-révolutionnaires se moquent des néologismes imaginés par les révolutionnaires. Sans être l'apanage de la droite, elle présente des affinités avec un conservatisme politique dont témoignent, à la fin du XX e siècle, les chroniques puristes du Figaro. Depuis 2008 cependant, Libération puis, à partir de 2011, Le Monde proposent des chroniques de langue d'une orientation sensiblement différente. Les usagers des mots à la mode y apparaissent comme les victimes inconscientes d'une novlangue venue de l'entreprise et des milieux de la communication. La satire des mots à la mode entre ainsi dans un schéma nouveau : ce n'est plus la droite qui reproche à la gauche d'abuser d'un jargon à la mode, mais plutôt la gauche qui raille un jargon à la mode initié par la droite.
Mots-clés :néologisme ; jargon ; mot à la mode ; presse ; gauche/droite Abstract: The satire of buzzwords is part of a long French tradition. This phenomenon appears in the press during the French Revolution: counterrevolutionary journalists make fun of neologisms created by revolutionaries. Although not exclusivy used by right-wing journals, it has affinities with political conservatism shown by the purist chronicles of Figaro at the end of the 20th century. Since 2008, however, Liberation and, from 2011, Le Monde offer language columns of a substantially different orientation. Users of buzzwords appear as unconscious victims of Newspeak from the business and communication world. The satire of buzzwords enters a new paradigm: once the right criticized the left because it was abusing a fashionable jargon, today the left mocks a fashionable jargon created by the right.