C'est avec une grande satisfaction et gratitude que je participe par un bref avant-propos à ce Hors-Série de la revue Internationale TraHs, dont les nombreux articles sont consacrés au thème Buen Vivir : bilan et expériences des dix années de la Constitution de l'Équateur.Tout en saluant cette importante édition, il me faut garder à l'esprit le contexte dans lequel celle-ci s'est construite, à savoir une crise épistémique et de nouvelles propositions paradigmatiques, reflets des insatisfactions, impasses et incohérences de notre civilisation contemporaine et de l'espace biophysique de la nature. Une telle déstructuration de notre temps qui affecte la rationalité humaine, les patrons culturels et l'environnement luimême, résulte des effets contre-productifs de la mondialisation et de l'effondrement du modèle déprédateur de développement capitaliste, socialement fragmentaire et moralement néfaste. On assiste à un essai d'harmonisation d'un processus économique effréné et illimité, fondé sur une dimension "productiviste-consumériste", oublieux de la préservation de la nature et de ses ressources limitées.Dans ce scénario qui entoure le monde de la vie et de la nature, des chemins alternatifs vers une autre durabilité post-capitaliste sont recherchés ; expression de nouveaux défis socio-biocentriques, elle favorise l'adaptation et l'équilibre entre l'homme, la culture et la nature. Dans cette dimension complexe où tout est étroitement lié et interdépendant, la reconnaissance et la diffusion de valeurs ancestrales alternatives à la rationalité occidentale moderne surgissent du Sud global, dans la région Andine de l'Amérique latine, notamment en Équateur et en Bolivie et font référence à la vision communautaire de l'autogestion entre les humains et la nature. Il s'agit du principe fondamental et holistique du " Buen Vivir" 2 (Sumak Kawsay), conçu et pratiqué par les populations indigènes et amazoniennes. Cette conception d'une vie harmonieuse entre les êtres humains et 1 Traduction de Alice Brites Osorio de Oliveira et Dominique Gay-Sylvestre. 2 Les traductrices ont préféré garder l'expression originale espagnole dans la traduction en français telle qu'elle était utilisée par l'auteur.