La géomorphologie climatique classique a fait de l’écosystème forestier tempéré l’un des moins agressifs qui soit. La présence d’une couverture forestière fermée éliminerait toute possibilité d’érosion autre que chimique. Des découvertes récentes effectuées au Québec remettent en cause cette idée de stabilité morphogénétique en forêt tempérée. Dans la région de Mont-Louis (Gaspésie), des cônes de déjection et des éboulis amorphes ou stratifiés, formes et dépôts qui auraient pu être interprétés en terme de paléoclimat périglaciaire, se sont constitués, de façon métachrone, durant toute la période qui va de la déglaciation à nos jours, et ce, indépendamment de l’évolution post-glaciaire du climat et de la végétation régionale. Leur constitution a chevauché indifféremment deux systèmes morphogénétiques : d’abord une période à climat périglaciaire entre plus de 13 000 BP et 9 300 BP; ensuite une période forestière à climat tempéré qui dure depuis 9 300 ans. La genèse de ces formes et dépôts de versant s’explique : 1) par la forte énergie de relief et la faible résistance des roches qui commandent une morphogenèse très intense capable de retarder et même contrecarrer l’établissement d’un couvert végétal forestier sur les versants, 2) par l’important retard accusé par la forêt dans la recolonisation du territoire après la déglaciation; 3) par l’action des eaux de fonte glaciaire et de la mer de Goldthwait qui ont longtemps sapé le pied des versants, retardant d’autant le début du processus de phytostabilisation des versants.In southern Québec there are many morphologie and stratigraphie indices of erosional activity subsequent to the last déglaciation, 10,000-14,000 years B.P. Because classical climatic geomorphology has for a long time considered the temperate forest ecosystem in its natural state as one of the least active of geomorphic systems, there has been a tendency to relate many of the resultant landforms and structures to climatic fluctuations and particularly to periglacial phases in the period of transition from the late Wisconsin to the early Holocene period. Whilst not denying the validity of certain of these relationships, the authors fieldwork on the steep slopes of northern Gaspésie show that morphogenetic stability did not coincide with the regional transition at about 9 300 years BP from a periglacial climate to a temperate forest climate. Alluvial cones, fans, stratified screes (grèzes litées) have been built up metachronously by various processes. The following local conditions contribute to the sustained vigour of this erosion; 1) the steepness of the slopes and the fissile nature of the bedrock producing intense and frequent operation of geomorphic processes which in turn retards the establishment of a protective vegetation cover, 2) the slow forest colonisation in the postglacial period, 3) the melt-waters from valley glaciers followed by wave action on the shores of the Goldthwait Sea causing the base of the slopes to be sapped until well into the postglacial period, thus also delaying the proc...