Les transformations des comportements politiques au prisme de l’e-pétitionnement

Abstract

S’appuyant sur la base d’un site de pétitions en ligne relative à plus de 15 000 pétitions qui ont récolté près de 3,8 millions de signatures, cet article montre que l’usage d’une telle source permet de dépasser certaines des apories des méthodes classiques d’étude des actions de mobilisations, notamment en passant de l’étude des déclarations de comportement à l’étude des comportements réels et en pouvant travailler une variété de mobilisations, mais aussi qu’une telle étude se heurte à une difficulté commune aux travaux sur les big data issus de l’Internet : l’absence d’une collecte supervisée aux fins de la recherche qui induit un ensemble de difficultés de traitement. Il invite dès lors à dépasser ces difficultés, d’une part en jouant du recoupement des données inédites issues de la base (horodatage, présence de commentaires…), et d’autre part en éclairant ces données par d’autres méthodes classiquement utilisées en sciences sociales (entretiens, questionnaires, etc.).

Introduction. La participation politique en ligne au révélateur du pétitionnement électronique

“…De pratique dépassée, il semble pour partie devenu l'un des sites privilégiés d'observation de l'émergence potentielle d'un nouveau rapport au politique et de nouvelles formes de participation politique. Et ce, d'autant qu'il permet très directement de comparer un passé et un présent, puisque l'epétitionnement est la poursuite directe du pétitionnement sous une autre forme, et qu'il est à l'origine d'un ensemble de « traces » qui peuvent en faire une source particulièrement propice pour étudier la pratique en train de se faire (Briassoulis, 2010 ;Corbett, 2011 ;Böttcher, Wolley-Meza, Brockmann, 2017 ;Yasseri, Hale, Margetts, 2017 ;Contamin, Léonard, Soubiran, 2017) ou pour construire un échantillon de cyber-militant•es à interroger (Durso et al, 2018).…”

“…Celui-ci fut pendant ses premières années d'existence le site francophone de pétitionnement en ligne le plus utilisé en Belgique, avant d'entrer en sommeil en 2016 puis d'être retiré de la Toile en 2019. Comprenant environ 15 000 pétitions et 700 000 adresses e-mail différentes de signataires, les données couvrent la période allant du 31 octobre 2006, date de la mise en ligne de la première pétition, au 12 février 2015, date de la transmission de la base sous une forme anonymisée par le propriétaire-gestionnaire du site au consortium de recherche APPEL 4 .Les caractéristiques de ce corpus singulier, ses potentialités et limites, ont été exposées par ailleurs(Contamin, Léonard, Soubiran, 2017). Signalons que la base se compose essentiellement de trois fichiers : l'un portant sur les pétitions (numéro d'identification, titre, texte…), l'autre sur les initiateurs et initiatrices des pétitions (données personnelles dont l'adresse postale), et le dernier, gros de près de 4 millions de lignes, sur les signatures (nom et adresse e-mail du ou de la signataire sous forme cryptée, prénom, localité et pays de résidence, profession, identifiant de la pétition signée, horodatage de la signature et de sa validation, texte du commentaire éventuel accompagnant la signature…).…”

Les mobilisations pétitionnaires en ligne sur le survol de Bruxelles et de ses environs : du syndrome Nimby à l’effet foot-in-the-door

“…*** À l'instar de plusieurs contributions à ce dossier de la revue Participations consacré aux pétitions en ligne, le matériau empirique principal sur lequel repose le présent article 1 réside dans une base de données servant de backend au site lapetition.be, dont les caractéristiques, potentialités et limites ont été exposées par ailleurs (Contamin, Léonard, Soubiran, 2017) et sont résumées en introduction de ce dossier. Cette base de données a été confiée sous forme anonymisée au consortium de recherche « APPEL » 2 .…”

Pétitions électroniques au Québec : entre transfert et résistance

“…Or, puisque les règles de la plupart des Parlements n'imposent pas la mise en oeuvre des pétitions électroniques, cet outil pourrait également être conçu comme un complément de la démocratie participative (Puschmann et al, 2017, p. 4). Le remplacement des pétitions papier -une pratique démodée depuis -par des pétitions électroniques s'inscrirait plutôt dans le cadre, non d'un déclin de la participation/mobilisation démocratique traditionnelle, mais bien dans son changement (Contamin, Léonard, Soubiran, 2017). D'ailleurs, les usagers des e-pétitions seraient sensiblement les mêmes que pour les pétitions papier (Lindner, Riehm, 2011).…”