Les frontières entre le sport et l'art à l'épreuve des écoles professionnelles de cirque

Abstract

Résumé À partir d’un travail de thèse sur la socialisation professionnelle des futurs artistes de « cirque contemporain », notre contribution montre, en prenant largement appui sur l’exemple type de l’École Nationale des Arts du Cirque de Rosny-sous-Bois, que les écoles professionnelles constituent des lieux de réinvestissement de dispositions sportives tant pour les formateurs, le plus souvent issus de la gymnastique sportive, que pour les apprentis artistes lors des processus de recrutement et du cursus de formation. De façon plus générale, et dans les six écoles étudiées, devenir artiste de « cirque contemporain » nécessite l’incorporation et l’accumulation de dispositions plurielles – sportives, artistiques et circassiennes – et hiérarchisées en fonction de la position de l’école dans l’espace de formation. Cette recherche questionne la façon dont les acteurs du « cirque contemporain », en empruntant à deux pratiques – le sport et l’art – socialement représentées comme antagonistes, mènent une entreprise de revalorisation et de légitimation du cirque sans pour autant résoudre les tensions liées à l’identification de la profession d’artiste de cirque.

Quand les circassiennes se réapproprient. Le pouvoir de leur corps par le théâtre

“…Si les étudiants font déjà preuve d'habiletés élevées et d'un fort potentiel avant même d'amorcer la formation, cette dernière ne leur est pas sans défi. Visant à les préparer au milieu de la scène contemporaine, cette formation donne à vivre des expériences diversifiées leur permettant de développer de hautes compétences techniques et une grande polyvalence (Herman, 2009;Salaméro et Haschar-Noé, 2008). Les étudiants se spécialisent habituellement dans une ou deux disciplines circassiennes tout en développant des bases générales liées à l'entraînement, l'acrobatie, la flexibilité, le jonglage et les équilibres.…”

Les modes de reconnaissance des artistes de cirque à l’épreuve du temps : de l’état du champ aux trajectoires professionnelles

“…(Wallon, 2001 : 121) L'ENSAC accélère ainsi le passage d'une socialisation familiale ou « sur le tas » au métier d'artiste de cirque à une forme scolaire, ainsi que la fixation de pratiques sociales qui ont permis de renouveler le cirque, au premier rang desquelles la pluridisciplinarité artistique et la division du travail autour d'un metteur en scène. S'y ajoute l'acquisition de savoir-faire sportifs permettant de renouer avec la performance (Salaméro, 2008).…”

“…Mis à part Valentin qui a déjà des dispositions physiques certaines, ces artistes voient initialement dans l'école du Lido, à l'époque essentiellement organisée autour du secteur amateur, un moyen d'apprentissage de techniques corporelles. C'est ainsi que ces artistes se familiarisent peu à peu avec l'espace scénique ; l'école, et plus largement le cirque, apparaissant comme une instance de transition vers l'art (Salaméro, 2008). Quoi qu'il en soit, l'atelier amateur, qu'ils sont rapidement amenés à prendre en charge (ou l'expérience professionnelle pour Valentin), constitue un lieu de formation sur le tas, comme cela peut être le cas pour les « artisans » du cirque rencontrés par MC Garcia (2011).…”