(Bautier, Rochex, 1998), remet en chantier ses façons d'enseigner dans l'espoir de contribuer à la démocratisation de l'enseignement des pratiques littératiennes. Toutefois, pour satisfaire cette ambition, la « révolution » intellectuelle que représente l'écriture est à mettre en continuité avec le développement de la parole. L'invention de l'écriture n'écrase pas, mais bien au contraire, stimule le phénomène langagier antérieur qu'est l'oralité, en intensifiant, dans l'espace et le temps, la densité des échanges langagiers. La coexistence maintenue des deux modes d'expression renforce leur concours implicite et plus ou moins visible dans l'apprentissage et la construction des connaissances. Le lien entre ces deux modes d'expression, qui sont devenus deux modes de pensée répondant à des logiques distinctes mais non contradictoires, est incidemment abordé par Vygotski (1930Vygotski ( /1997) et caractérisé par la distinction qu'il fait entre « concept quotidien » et « concept scientifique ». Ce dédoublement est alors exemplifié par la différence entre l'apprentissage de la langue dite « maternelle » lors de la première socialisation 2 et l'apprentissage d'une langue étrangère. La modification dans l'activité d'apprentissage que représente la langue étrangère, par rapport à la langue maternelle, contraint à prendre en compte deux démarches d'acquisition distinctes par le niveau de conscience, dont il me semble nécessaire de comprendre la juxtaposition dans les pratiques langagières d'un même sujet d'énonciation. Le « concept scientifique », fait appel à un effort de conscience et est, en cela, comparable aux notions de « littératie » de Goody (1968), de « code élaboré » de Bernstein (1975) ou de «secondarisaiton » de Bautier (2005), Jaubert et Rebières (2003), qui soulignent que cette pratique littératienne consiste à faire retour sur la première pratique langagière, en situation d'échanges parlés. Ces notions attestent de l'émergence d'une transformation du rapport au langage consécutif de l'invention de l'écriture. Autrement dit, les savoirs scripturaux modifient, infléchissent le développement de la pensée humaine induite jusque-là par la parole. Ils se sont transmis historiquement et, jusqu'à présent (Chervel, 2006) de façon plus ou moins inégalitaire en fonction de la classe sociale et du sexe.L'effort d'ouverture des lycées à l'ensemble d'une classe d'âge a révélé que le fait d'exposer une génération, toutes classes sociales confondues, aux connaissances telles que l'école les transmettait, n'entraîne pas, pour tous, leur appropriation dynamique. Le travail de Bautier et Rochex en 1998 met en évidence la disparité entre volonté de démocratisation et massification (« Les nouveaux Lycéens »). La sociologie du langage (Bautier, 1995) permet de dégager un usage cognitif du langage qui rappelle que les pratiques langagières sont des pratiques sociales. Par conséquent, les pratiques scolaires puis scientifiques (1982), je me suis demandé : « Ce qu'écrire veut dire », c'est-à-dire ce qu'implique comme transformati...