Dans un contexte d’expansion et de fragmentation des sciences sociales liées, en partie, aux transformations du champ politique avec la construction d’une « demande sociale » après la seconde guerre mondiale, la sociologie rurale française s’est imposée comme une spécialisation reposant sur l’opposition ville-campagne, le présupposé d’une forte spécificité et d’un particularisme du monde rural. La théorie des sociétés paysannes a accompagné les transformations de la paysannerie avec la redéfinition de sa place dans la société française. L’outillage conceptuel de la sociologie rurale ne permet pas d’analyser les changements observables depuis les années 1975 notamment l’intensification des mobilités entre les villes et les campagnes, l’effondrement de la population agricole devenue nettement minoritaire dans la plupart des espaces ruraux, les transformations de l’agriculture. L’effacement institutionnel de la sociologie rurale observable à la fin des années 1970 ne signe pas la fin des travaux portant sur le monde rural. On assiste à une diversification des productions tant du point des thématiques que des problématiques. Si certains travaux s’inscrivent dans le sillage de la sociologie rurale des années 1960‒1970, d’autres sont produits par une nouvelle génération de sociologues qui n'a pas été formée à la « sociologie rurale » avec ses présupposés, ses concepts spécifiques. C’est à partir des champs de la sociologie dans lesquels ils s’inscrivent (sociologie politique, sociologie économique, sociologie du genre, sociologie de la socialisation…) qu’ils investissent les terrains ruraux, ce qui n’exclue pas de considérer que les « espaces ruraux », au-delà de leur diversité, conservent certains traits spécifiques.