Se réclamer de l'influence napoléonienne est impossible dans l'Espagne des lendemains de la Guerre d'Indépendance. Pourtant, l'évolution de la Révolution libérale qui vit progressivement l'emporter un libéralisme oligarchique conservateur valorisa de plus en plus ouvertement un modèle d'Etat qui est celui de la France post-napoléonienne, centralisateur, uniformisa- teur et autoritaire. L'emprunt fait au modèle napoléonien porte sur l'art de la propagande, et surtout sur le modèle juridico- administratif. L'État libéral qui se met progressivement en place aux lendemains de la Guerre d'Indépendance porte la marque certaine de l'influence française -confirmée par le rôle de l'exemple français dans la genèse du droit administratif espagnol- tout en s'insérant dans le même temps dans la tradition du réformisme du despotisme éclairé qui est la version espagnole d'un vaste mouvement européen de transformation des sociétés d'Ancien Régime. Par ailleurs, l'emprunt à la France n'est que partiel : le modèle est dépouillé de tout romantisme et de toute mystique populaire. Il exclut totalement les masses, puis dans une large mesure les classes moyennes pour limiter l'exercice du pouvoir à une étroite élite. Il fait ensuite l'impasse sur les moyens financiers indispensables à l'existence d'un État fort.