Un repas indigeste« Tu vas pouvoir manger ton chapeau », m'avait lancé il y a quelques années Bernard Barataud, ce Président sans lequel l'AFM (Association française contre les myopathies) ne serait pas ce qu'elle est aujourd'hui. Il se référait à notre désaccord sur la thérapie génique, objet entre nous deux de discussions « cordiales mais musclées » depuis plus de vingt ans. J'ai en effet régulièrement exprimé mon scepticisme par rapport aux perspectives radieuses de cette approche thérapeutique, telles qu'on les appréhendait dans les années 1990, et ma gêne devant la manière dont l'AFM en faisait son principal cheval de bataille [1]. Scepticisme que B. Barataud m'a souvent reproché alors que, selon lui, les recherches étaient en train de déboucher. Le fait est pourtant que, jusqu'à récemment, la seule thérapie génique ayant fait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché était, en Chine, un procédé de traitement local des cancers de la sphère ORL. Baptisé Gendicine, il a été autorisé par la State food and drug administration (SFDA) chinoise dès 2004, et consiste en une préparation contenant le gène p53 dans un vecteur de type AAV (adenovirus-associated virus) et injectée directement dans la tumeur [2]. Cette thérapie a fait preuve d'une efficacité modeste, et les données la concernant ont été pour l'essentiel publiées dans des journaux chinois d'audience limitée. Des produits du même type mis au point aux États-Unis, notamment l'Advexin développée par l'entreprise Introgen Therapeutics, ne sont pas arrivés jusqu'à la phase de commercialisation malgré des essais en phase II et même III [1], tandis qu'en Chine, l'Oncorine, produit assez similaire, recevait l'accord de la SFDA en 2005.
Des péripéties parfois dramatiques, un espoir persistantL'engouement, dans les années 1990, pour cette approche thérapeutique apparemment prometteuse