Le crime organisé occupe aujourd'hui une place centrale dans l'agenda de la sécurité d'une grande partie des pays d'Amérique latine et des Caraïbes. Alors que, dans de nombreux pays, les déclarations politiques et médiatiques sur la gravité du problème sont légion, on manque toujours d'études précises sur ses différentes dimensions, à l'exception peut-être du trafic de drogue dans certains pays 1 . En 2003, l'Organisation des États américains a identifié le crime organisé, aux côtés du terrorisme, comme la « principale menace à la sécurité régionale ». À côté de la vieille -mais toujours actuellewar on drugs américaine, de nouvelles notions aux connotations belliqueuses sont apparues, comme le « narcoterrorisme », les « nouvelles guerres », ainsi qu'une série de questions sur l'existence de liens entre « les maras d'Amérique centrale et Al-Qaïda ». Ces discours et ces images circulent à l'échelle planétaire et contribuent à renforcer le sentiment qu'en Amérique latine, comme dans d'autres régions du Sud, « la criminalité violente est devenue une caractéristique endémique de la condition postcoloniale 2 ». Les métaphores guerrières ainsi que le pessimisme sur la capacité de l'État * Gabriel Kessler est sociologue, chercheur au CONICET -université nationale de La Plata/Metraljeux). Il a publié récemment el sentimiento de inseguridad. sociología del temor al delito, Buenos Aires, Siglo XXI, 2009.1. Il existe, en fait, un grand nombre d'études sur le trafic de drogue, surtout au Brésil et plus particulièrement à Rio de Janeiro, parmi lesquelles se distinguent celles d'Alba Zaluar et de Michel Misse. À signaler également les travaux d'auteurs comme Francisco Thoumi sur la Colombie, Luis Astorga et Jorge Chabat sur le Mexique. On signalera leur contribution au débat dans cet article et dans plusieurs autres articles de ce numéro de Problèmes d'Amérique latine.2. J. et J. Comaroff, violencia y ley en la poscolonia : una reflexión sobre las complicidades norte-sur, Barcelone, Katz, 2009, p. 17.