Notre édition du procès fait au jeune Claude Colley en 1575 dans les Vosges illustre la perception du crime de bestialité et la gravité de la peine encourue à une certaine époque et seulement dans le monde judéo-chrétien. Le cas introduit aussi tout un programme de recherche, sur un aspect de l’histoire des mœurs et des sexualités à l’époque moderne – le point haut de la répression – et avant et après. L’origine est en effet biblique (Lévitique, 20.15-16) et, après un long temps d’indifférence, l’acte est de nouveau criminalisé depuis les années 2000 ou 2010, mais pour des raisons complètement différentes de celles du passé. À l’époque moderne les procédures sont rares. Cela ne prouve pas que l’acte était exceptionnel. Mais il faut utiliser le plus possible chaque cas retrouvé. L’article met en perspective ce cas, dans son époque ( xvi e et xvii e siècles) et dans la longue durée. Il pose aussi la question des sources : rares, souvent perdues (détruites exprès) et qui correspondent à des situations ambiguës. L’acte est toujours méprisable. Mais les gens qui ont eu connaissance de l’acte et qui l’ont dénoncé, au lieu de l’ignorer, ont souvent voulu faire de son auteur un criminel et presque certainement un condamné. Ce n'est pas seulement une affaire de morale. Les justiciables utilisent la justice pour parvenir à leurs propres fins.