Résumé
Vincennes est une des communautés fondées par les Français à l’intérieur de l’Amérique du Nord qui demeure encore trop peu connue des historiens, surtout après 1763, lorsque le village devient possession britannique puis, rapidement, américaine. Il s’agit ici de jeter un éclairage neuf sur des temps troublés et incertains, entre la fin du Régime français et 1795, lorsque la puissance militaire amérindienne semble définitivement réduite dans la région et qu’un prêtre s’installe à demeure sous la double tutelle de l’État fédéral américain et l’évêque de Baltimore. Durant ces trente années, c’est le rapport entre les habitants et leurs autorités de tutelle qui est scruté : d’une part, la Couronne britannique, les États-Unis, et surtout dans les deux cas leurs représentants locaux, plus ou moins autonomes ; et d’autre part l’Église, qu’elle soit de Québec ou plus tard de Baltimore, et les prêtres qu’elle envoie sur place, difficilement et irrégulièrement. Les Vincennois, bien insérés dans un ensemble continental qui court de Québec à La Nouvelle-Orléans, de Baltimore à Saint-Louis, sont à la fois au fait des réalités les plus larges et prompts à défendre leur identité et leurs intérêts locaux, qu’ils soient d’ordre politique ou religieux. Cela doit se faire par des compromis, dans l’incompréhension souvent, sous la pression d’instances de contrôle extérieures que les Vincennois tentent de maîtriser eux-mêmes.
L'Église, les libéraux et l'État : les livres de jeunesse publiés par Mame dans le Bas-Canada du milieu du 19 e siècle Tangi Villerbu* Les années 1840-1850 sont pour le Bas-Canada celles de la recomposition. Après l'échec des Rébellions de 1837-1838, l'Acte d'Union de 1840 oblige à repenser le développement du Canada français. L'Église a trouvé une légitimité forte dans la défense de l'ordre colonial comme dans un ultramontanisme de plus en plus affirmé et tente de s'imposer comme force motrice de la société canadienne ; les libéraux se divisent, certains luttant toujours pour imposer leur vision nationale, d'autres passant des compromis tant avec l'Église qu'avec la Couronne. L'État de son côté relance un programme de scolarisation centralisé et appuyé sur un nouveau corps d'inspecteurs, signe visible d'une volonté de contrôle social parallèle à celle de l'Église. On se trouve là au carrefour de notions qui animent l'historiographie la plus récente du Canada : les problèmes entrelacés du poids de l'Église catholique et du libéralisme, de l'insertion de la société bas-canadienne dans une histoire globale, de l'émergence d'institutions productrices de normes sociales, culturelles, morales 1 . * Tangi Villerbu est maître de conférences en histoire contemporaine à l'Université de La Rochelle, membre du Centre de recherche en histoire internationale et atlantique (CRHIA, EA 1163), et membre associé du Centre d'études nordaméricaines (CENA-MASCIPO, UMR 8130). Il travaille actuellement en parallèle sur l'histoire de l'Ouest étasunien au 19 ème siècle du point de vue de la construction du catholicisme et sur l'histoire de l'éditeur catholique français Mame dans ses rapports au Canada (dans le cadre du « projet Mame », labellisé ANR).
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