Devenir parent, dernière et ultime aventure des temps modernes 1 ? Chacun d'entre nous a son histoire de naissance. Sont-elles plus belles aujourd'hui, étaient-elles plus belles hier ? En parle-t-on ?L'offre technique médicale à la procréation, notamment celle avec don de gamètes, met au grand jour l'intervention de trois adultes dans la conception d'un individu unique et singulier, et, par conséquent, nous entraîne à parler de parenté biologique, naturelle, légitime, intentionnelle [1-3]. En France, cette procréation avec l'aide d'un tiers est bâtie sur trois principes éthiques : le volontariat, l'anonymat et la gratuité du don. La création par Georges David des Centres d'étude et de conservation des oeufs et du sperme (CECOS) dans les années 1970 a joué un rôle important dans ce choix éthique. En effet, non seulement les CECOS avaient la volonté de sortir ces pratiques de la clandestinité, mais surtout ils ont proposé un cadre médical éthique et rigoureux qui nous permet, aujourd'hui encore, de débattre de ces questionnements sur un plan philosophique, moral et anthropologique.L'anonymat du don est, sans doute, le principe le plus contesté aujourd'hui, et la tentation est grande de se laisser dériver dans un dualisme, qui oppose les partisans de ce choix à ceux qui le condamnent. Si certains le présentent comme un moyen d'assurer le secret du mode de conception, permettant d'affronter la souffrance de l'infertilité, et de magnifier l'intentionnalité du désir d'être parent, d'autres le désignent comme un camouflage fait à l'enfant. En effet, si ce non-dit protège l'identité du donneur et donne au couple receveur toute liberté de choisir le moment opportun pour raconter à son enfant l'histoire de sa naissance, il ne tient pas compte des conséquences de cette révélation, plus ou moins tardive, faite à l'enfant issu de ce don, ainsi qu'aux enfants du couple donneur. Alors que faire ?Il nous faut réfléchir à ce que provoque l'anonymat du don de gamètes, et par conséquent, revenir sur ce que c'est que donner, c'est-à-dire revenir au geste qui est fait à travers cette action. À cet effet, nous pouvons relire un texte ancien que tout le monde connaît et qui a imprégné notre humanité dite occidentale ; il s'agit de la parabole du bon Samaritain. Cette pensée en image justifie une herméneutique moderne, qui peut nous aider à mieux comprendre notre monde. Saint Luc (10, 30-36) : « Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho. Il tomba dans les mains des brigands, qui le dépouillèrent, le chargèrent de coups et s'en allèrent, le laissant à demi-mort. Un prêtre vint à descendre par ce chemin-là ; il le vit et passa outre. Un lévite, qui arriva aussi dans ce lieu, l'ayant vu, passa outre. Mais un Samaritain, qui voyageait, étant venu là, fut ému de compassion lorsqu'il le vit. Il s'approcha et banda ses plaies... puis il le mit sur sa propre monture, le conduisit à une hôtellerie, et prit soin de lui. Le lendemain, il tira deux deniers (une forte somme), les donna à l'hôtelier et dit : « Aie soin de lui et ce que tu dépenseras...