La poésie d'Amelia Rosselli (Paris, 1930-Rome, 1996 est un cas unique dans la littérature italienne du XX e siècle 1 . Cette poésie située entre trois langues témoigne d'une inventivité et d'une force expressive rares. Révélée par Pasoliniqui préfaça sa première publication 2 -Amelia Rosselli est depuis quelques années au coeur d'une redécouverte critique. Trop de commentaires se sont néanmoins inutilement concentrés sur sa biographie romanesque, certes nécessaire pour comprendre le devenir des langues dans son oeuvre 3 . Amelia Rosselli est née à Paris en 1930 de mère anglaise et de père italien. Carlo Rosselli était résistant au fascisme, exilé à Paris. Lorsqu'il fut assassiné en 1937, Amelia avait sept ans. Elle fuit avec sa famille, d'abord à Londres, puis aux États-Unis. Elle revint en 1947 à Rome, où elle vécut en se consacrant entièrement à l'écriture. Elle traversa tout au long de sa vie une grave maladie psychique et se suicida en 1996.En concurrence avec l'italien, sa langue principale d'expression écrite, elle écrivit aussi en anglais et en français. Ses textes présentent en permanence des interférences des deux autres langues, quelle que soit leur langue principale.Primi Scritti est le recueil qui reflète le mieux le multilinguisme complexe de l'auteure. Celui-ci comprend des proses poétiques et des poèmes en italien, français et anglais, écrits entre 1952 et 1963, revus et contrôlés jusqu'à la date de publication (1980). Mais tous les textes comportent un facteur plurilingue, comme le poème italien Impromptu, publié en 1981 4 .
Interprétations du multilinguismeLes langues du poète Selon L. Forster 5 , la signification du multilinguisme dépend du contexte culturel, historique, et en général de la fonction conférée à la langue et à la littérature. Ainsi, les textes multilingues anciens, comme la fameuse chanson Aï faux ris…, que certains attribuent à Dante, n'auraient pas les mêmes enjeux qu'au XX e siècle. Au Moyen âge ou à Les langues d'Amelia Rosselli Revue critique de fixxion française contemporaine, 3 | 2011