> La quasi-totalité des études menées depuis une vingtaine d'années sur l'approvisionnement et l'apprêtement des peptides antigéniques au complexe majeur d'histocompatibilité de classe I (CMH-I) montrent que la source majeure de ces peptides provient de la dégra-dation de protéines endogènes. Cette dégradation se fait via le complexe du protéasome, système protéolytique majeur du cytosol [1]. C'est en 1996 que tous ces modèles vont être remis en cause par l'équipe de Yewdell et al., qui fut la première à émettre l'hypothèse selon laquelle les peptides présentés par les molécules du CMH-I ne proviendraient pas de la dégradation de protéines entières, mais plutôt de produits défectueux de la machinerie traductionnelle, les DRiP (defective ribosomal products) [2].Les pioneer translation products (PTP) : produits d'une traduction précoce des ARN Même si des études préliminaires suggèrent que les produits de traduction alternatifs dans la cellule sont la source majeure de peptides antigéniques portés par le CMH-I, à ce jour peu de progrès ont été faits sur l'identification des polypeptides dont ils proviennent. Durant le processus de transcription, la particule ribonucléoprotéique qui contient l'ARN -la mRNP (messenger ribonucleoprotein particle) -, se forme [3]. Elle est composée par des complexes protéiques qui s'associent autour de l'ARNm, tels que le complexe d'épissage, mais aussi d'autres facteurs permettant de le protéger d'une éventuelle dégradation. Avant qu'il ne soit permis aux ARNm d'interagir avec des facteurs d'initiation de la traduction (dont eIF4E), un mécanisme de contrôle de la qualité de l'ARNm se met en place lors d'un mécanisme de traduction pré-coce (Figure 1). Nous avons mis en évi-dence, au cours d'une de nos récentes études, que la synthèse de peptides antigéniques de classe I, à partir d'ARNm codant pour la protéine ovalbumine (Ova), s'arrête bien avant la synthèse de la protéine elle-même, corroborant l'hypothèse des DRiP. De même, nous avons démontré que la production de ces substrats antigéniques coïncide avec une phase précoce de la traduction. Au cours de ces étapes de traduction précoce, appelées pioneer round of translation, les ARNm sont scannés dans le but d'éli-miner ceux qui portent des mutations aberrantes. Cependant, nous avons montré que, si un épitope codant pour un peptide antigénique présenté au CMH-I est inséré dans un ARNm comportant un codon stop précoce, et qui sera donc dégradé rapidement, cet ARNm est toujours capable de produire des peptides antigéniques en quantité semblable à celle que produirait un ARNm qui ne serait pas dégradé et serait ensuite traduit en une protéine fonctionnelle dans le cytoplasme. Cela suppose que, durant les étapes précoces de la traduction, des polypeptides sont produits, appelés PTP (pour pioneer translation products), qui sont utilisés par la voie du CMH-I afin d'induire une réponse immunitaire. Ce sont les premiers polypeptides produits par les ARNm ; ils possèdent les propriétés nécessaires pour être des substrats peptidiques antigéniq...