Pourquoi se saisir d'un si vaste corpus ? À ce jour, les spécificités sociales relativessystème agraire, organisation ecclésiale, infrastructures, découpages territoriaux, réseaux d'individus, formes culturelles, etc.-des zones composant l'Europe médiévale restent encore largement méconnues, tout comme le sont, symétriquement, les facteurs de la dynamique occidentale entre les VII e et XIV e siècles 3. L'approche monographique a en effet dominé les études médiévales, malgré les voix discordantes de chercheurs éminents, de Numa Denis Fustel de Coulanges 4 [1830-1889] à Jacques Le Goff 5 [1924-2014], en passant par Georges Duby [1919-1996], Robert Fossier [1927-2012], Pierre Toubert et Jérôme Baschet, qui se sont élevés contre cette perspective, affirmant en substance que « c'est en discernant avec le même soin, au sein d'une globalité, articulations et discordances, que l'on peut tenter d'édifier une histoire des sociétés médiévales 6 ». Sans rejeter ce paradigme très riche, cette recherche constitue une tentative pour reconstruire les liens entre différentes structures documentaires (et donc sociales), considérées la plupart du temps de manière isolée. L'oeuvre d'Alain Guerreau joue ici un rôle fondamental et constitue un des points de départ théoriques de l'enquête 7. Ses racines sont néanmoins historiographiquement plus profondes, puisque le travail s'inspire des ouvrages des XIX e et XX e siècles ayant eu pour visée la compréhension du féodalisme européen, dans sa cohérence et sa diversité. Elle L'écriture du monde (I).