La projection en macro-syntaxe et en linguistique interactionnelle : dimensions théoriques et empiriques 3. La linguistique interactionnelle reprend le programme de l'analyse conversationnelle fondée dans les années 60-70 par Sacks, Schegloff et Jefferson (1974), tout en revendiquant une approche davantage centrée sur le langage, alors que l'analyse conversationnelle est d'abord une branche de la sociologie inspirée de LANGUE FRANÇAISE 192 rticle on line rticle on line Phénomènes d'attente et de projection Au plan méthodologique, ces deux approches partagent le souci de travailler sur des corpus authentiques, avec un intérêt particulier pour l'analyse de l'oral. Les objets d'étude sont au demeurant souvent communs 4 , mais si les intérêts scientifiques coïncident sur plusieurs points, il y a cependant de manière générale peu... d'interaction entre les macro-syntacticiens et les interactionnistes. Notre étude entend mettre en rapport (ou parfois confronter) le traitement, par les deux approches, des phénomènes de projection. Dans les sections 2 et 3, nous ne pourrons que baliser le champ de la projection dans les deux perspectives, en ciblant pour chacune certains aspects révélateurs des objets scientifiques qui les intéressent. Nous présentons succinctement la macro-syntaxe et la linguistique interactionnelle avec la terminologie propre aux cadres en question, en proposant des définitions lorsque certains concepts communs recouvrent des réalités différentes. 2. LA NOTION D'ATTENTE EN MACRO-SYNTAXE 2.1. Définition La notion d'attente dans le modèle macro-syntaxique fribourgeois (Groupe de Fribourg 2012) est définie comme une forme d'inférence prédictive, mais non nécessaire. Elle n'a en effet qu'un caractère plausible (ou abductif), puisque seule la suite du discours confirme (ou non) que l'inférence était la bonne. A. Berrendonner en donne la définition suivante, où une action se définit comme une opération sur la mémoire discursive (cf. infra § 2.2) : Si une action A1 est accomplie, et qu'elle est (en général, per se) un préalable nécessaire à l'exécution d'une autre action A2, alors on peut en conclure que A2 va probablement avoir lieu. Il y a en effet de fortes chances pour que A2 soit visée à travers A1. Chaque fois qu'un tel raisonnement est faisable, nous dirons que A1 ouvre l'attente de A2. (Groupe de Fribourg, 2012 : 134) Le cas des constructions pseudo-clivées illustre bien de quoi il retourne : l'ethnométhodologie. Dans le cadre de cet article, nous utilisons uniquement le terme de « linguistique interactionnelle ».