Prévalence et Facteurs Associés aux Symptômes Dépressifs chez les Pères d’enfant 6 mois-17 ans au Québec

Abstract

Ré sumé Objectifs : Chez les pères, les symptô mes dépressifs vécus pendant la grossesse et après la naissance représentent un facteur de risque de la dépression dans les premiers mois de vie de l'enfant. Puisque celle-ci peut avoir de lourdes conséquences sur leur engagement ultérieur auprès de l'enfant, cette problématique est préoccupante et nécessite qu'on s'y attarde. Or à ce jour, peu d'études ont porté sur la dépression paternelle et sur ses déterminants au-delà de la période périnatale. Mé thode : Cette étude utilise les données d'une enquête provinciale représentative réalisée auprès de 1342 pères d'enfants âgés de 6 mois à 17 ans. Elle documente la prévalence des symptômes dépressifs modérés et graves à l'aide du CES-D ainsi que leurs facteurs associés. Ré sutats : Les résultats montrent des prévalences variant de 3% à 10% selon la gravité des symptô mes dépressifs et l'âge des enfants. Parmi les facteurs associés, on retrouve la consommation problématique d'alcool, l'absence d'un emploi, le stress lié à la conciliation famille-travail, le climat de violence conjugale ainsi que de faibles revenu et soutien social. Conclusion : Ces résultats sont interprétés à la lumière du rôle et de l'engagement des pères dans la vie de l'enfant et soulèvent l'importance d'identifier auprès de cette population les symptô mes dépressifs au-delà de la période périnatale tout en portant une attention à l'intensité de ces symptômes.

Symptômes dépressifs vécus par les parents dans la population générale: État des travaux québécois et canadiens.

“…Les résultats montrent tout de même l'importance des problèmes de consommation d'alcool, du stress lié à la conciliation des activités familiales et extra-familiales, de l'absence d'un emploi, du climat de violence conjugale et d'un faible soutien social dans la prédiction des symptômes dépressifs chez les pères (Leung et al, 2017;Luoma et al, 2013). Des analyses précédentes réalisées avec les données de l'enquête de 2012 en arrivaient à des conclusions similaires (Clément et al, 2019a(Clément et al, , 2019b, appuyant d'autant plus l'importance de ces facteurs dans le vécu dépressif des pères.…”

“…Autrement, l'analyse secondaire des données de l'enquête CCHS a permis à Bassani et al (2009) d'estimer la prévalence de l'exposition des enfants à divers troubles de santé mentale des parents, dont les symptômes dépressifs, sans toutefois préciser le genre parental. Ce constat est surprenant considérant que de plus en plus d'études à travers le monde s'intéressent aux troubles de santé mentale des pères en période postnatale (Cameron et al, 2016;Clément et al, 2019aClément et al, , 2019b, certaines allant même jusqu'à documenter les symptômes dépressifs des pères d'enfants et d'adolescents (Rosenthal et al, 2013).…”

“…Chez les pères, les facteurs de risque personnels et familiaux associés aux symptômes dépressifs, outre ceux observés chez la mère (Cameron et al, 2016; Underwood et al, 2017), incluent le stress parental (de Montigny et al, 2013; Recto & Champion, 2020; Rosenthal et al, 2013), la consommation de drogues ou d’alcool (Bronte-Tinkew et al, 2007; Recto & Champion, 2020), le stress lié à la conciliation travail-famille (Clément et al, 2019b), la qualité de la relation conjugale (Bergstrom, 2013; Nath et al, 2016) et la violence conjugale (Recto & Champion, 2020). De nombreux facteurs socio-économiques ont aussi été documentés pour leur effet prédicteur des symptômes dépressifs chez les pères après la naissance tels que le faible niveau d’éducation (Bergstrom, 2013; Bronte-Tinkew et al, 2007), la pauvreté (Clément et al, 2019b), le fait d’être sans emploi (Clément et al, 2019b; Massoudi et al, 2016; Nath et al, 2016; Rosenthal et al, 2013; Underwood et al, 2017) ou de vivre des conditions de travail difficiles (Bergstrom, 2013; Massoudi et al, 2016) et la perception d’un faible niveau de soutien social (Clément et al, 2019b; Massoudi et al, 2016; Recto & Champion, 2020).…”

“…L’enquête longitudinale CHILD ( Canadian Healthy Infant Longitudinal Development Study ; Chow et al, 2019; Dharma et al, 2019) a été réalisée pour sa part à Vancouver, Edmonton, Winnipeg et Toronto. Au niveau provincial, trois enquêtes populationnelles ont documenté les symptômes dépressifs chez les parents, soit l’Ontario Mother & Infant Survey (Watt et al, 2002), l’enquête All our Families en Alberta (Hentges et al, 2020; Premji et al, 2019), l’étude longitudinale sur le développement des enfants au Québec (ELDEQ; Japel et al, 2000; Roy et al, 2005) et l’Enquête sur la violence familiale envers les enfants du Québec (EVF; Clément et al, 2019a, 2019b). Les autres études ont eu recours à des échantillons de convenance de parents recrutés dans les hôpitaux lors du suivi prénatal ou de l’accouchement (Da Costa et al, 2017, 2019; Dennis et al, 2016; Fairbrother et al, 2015, 2016; Hentges et al, 2020; Watt et al, 2002).…”

“…Du nombre total d’entrevues réalisées auprès d’un parent, 4 029 concernent les mères avec un taux de réponse pondéré de 54.4% et 1 342 concernent les pères avec un taux de réponse pondéré de 47.8% (Clément et al, 2013). À noter que les données sur les symptômes dépressifs déclarés par les pères en 2012 ont fait l’objet d’une analyse antérieure et sont reprises dans le cadre du présent article (voir Clément et al, 2019b).…”