Plusieurs programmes et services ont été développés en vue d’adapter les interventions policières et les processus judiciaires aux besoins des personnes ayant des troubles mentaux, de surcroît lorsque celles-ci sont en situation d’itinérance. La présente étude adopte un devis qualitatif descriptif afin d’explorer l’expérience qu’ont les personnes vivant à la fois une situation d’itinérance et un trouble mental de ces services. L’analyse de six entretiens révèle les représentations complexes que se font les participants de leur implication judiciaire, entre sentiment de responsabilité et d’injustice ; le manque de légitimité vécu dans la plupart de leurs interactions, auquel l’accompagnement offre parfois un contrepoids ; et enfin des perceptions distinctes des services selon leur nature « régulière » ou « alternative ». Les participants mettent à l’avant-plan dans leurs récits les principes de la justice procédurale, en particulier ce que des processus dits « alternatifs » permettent à cet égard, mais également le caractère exceptionnel d’interactions respectant ces principes. Les résultats nous amènent à interroger la capacité des diverses institutions sociales à offrir des services vécus comme justes par les personnes situées au confluent d’identités sociales marginalisées, à différents moments de leurs parcours.