Les jeux vidéo sont devenus un moyen d’expression et de connaissance privilégié par les jeunes. Ils permettent de développer la prise de parole au sein de la famille, avec les pairs, entre joueurs et créent du lien social. Cet article interroge, à partir d’une analyse de la littérature surtout anglo-saxonne, la façon dont ils participent au processus de démocratisation des sociétés contemporaines en développant l’agentivité (agency) des enfants et adolescents et celle dont les filles peuvent se les approprier. Il discute des freins et limites de ce processus pour les filles. Celles-ci restent peu visibles dans l’espace médiatique et sont bien moins nombreuses dans le eSport. Les harcèlements sexistes les mènent à adopter des stratégies de camouflage –avatar masculin, modification de la voix– ou à abandonner la compétition. L’eSport serait-il un espace de réaffirmation de l’identité et de la domination masculine en maintenant le contrôle de la parole dans un domaine médiatisé ? La parole de la joueuse, sa prise en compte dans l’espace ludique public sont un point aveugle à questionner. Les jeux vidéo et les loisirs, espaces intermédiaires de socialisation, sont trop sous-estimés par les chercheurs, les éducateurs, les politiques, pour comprendre ce qui se joue dans la socialisation enfantine. Des pans entiers de la compréhension des pratiques juvéniles échappent encore et peuvent conduire à des choix contre-productifs sur le plan éducatif.