La myopathie de Duchenne : un cas d'école pour le saut d'exon thérapeutique (SET)Rappelons que la myopathie de Duchenne (DMD) est une dystrophie musculaire sévère de l'enfant, due à des mutations nulles siégeant dans l'énorme gène DMD situé sur le chromosome X, qui empêchent toute synthèse d'une protéine subsarcolemmique, la dystrophine. La myopathie de Becker (BMD) est une dystrophie musculaire moins sévère, plus tardive et moins évolutive, résultant d'une pathologie du même gène, où des mutations non-nulles permettent la production d'une dystrophine qualitativement anormale et/ou quantitativement diminuée (pour revue, voir [2]). Vingt ans après la découverte du gène en cause et de sa pathologie, il n'existe toujours pas de thérapeutique rationnelle capable sinon de guérir le processus dystrophique du moins d'en enrayer le cours inéluctable. Les espoirs prématurément fondés sur la thérapie génique conventionnelle ayant été déçus, le concept de « thérapies fondées sur la connaissance des gènes » est actuellement développé tous azimuts [2,3]. On essaie soit d'intervenir sur le génome, sur l'épis-sage, sur la traduction, sur le protéome, soit de régénérer le muscle par cytothérapie, soit de combiner les deux en effectuant une cyto-génothérapie 1 . Le principe du saut d'exon thérapeutique (SET) a déjà été expliqué dans les colonnes de Médecine/Sciences [4,5]. En bref il s'agit de rendre fonctionnel un transcrit qui ne l'est pas parce qu'il porte un stop prématuré, résultant soit d'une substitution ponctuelle (non-sens direct), soit d'un décalage du cadre de lecture (non-sens secondaire) produit par une délétion, une duplication ou une mutation d'épissage. La restauration du cadre de lecture est obtenue en modifiant l'épissage du transcrit primaire afin d'éliminer soit l'exon portant le stop direct (cas de la souris mdx avec sa mutation non-sens dans l'exon 23), soit un ou plusieurs exons jouxtant les exons mal raccordés (Figure 1). Encore faut-il que la protéine tronquée résultante soit fonctionnelle. Cette anticipation est fondée sur le fait que le patho-phénotype atténué de la myopathie de Becker résulte de délétions du gène DMD, parfois très grandes, mais respectant le cadre de lecture [6]. L'observation d'une délétion en phase des exons 17 à 48 remarquablement bien tolérée et ne se manifestant cliniquement qu'après l'âge de 60 ans, a conduit à la notion de mini-dystrophine où la protéine est amputée de 46 % [7]. Ceci indique que la dystrophine est relativement tolérante vis-à-vis des troncations internes. Les limites topographiques de cette tolérance ont été précisées expé-rimentalement chez la souris, aboutissant à la notion de « micro-dystrophine », une 1 Cette dernière approche a été commentée dans le dernier numéro de Médecine/Sciences [5]. entité encore fonctionnelle malgré l'amputation de 20 des 24 répétitions de spectrine dans le domaine central, correspondant à une délétion en phase des exons 17 à 57 [8]. Au total, l'organisation du gène DMD avec ses 79 exons dont le découpage ne coïncide pas avec celui...