Construction sociale de la « prostitution » et des « prostituées » par les riverains
Quand nommer est classerQue désigne-t-on au juste quand on parle de la prostitution ? Que recouvrent les termes prostitution et prostituée ? Les politiques publiques, pénales, sanitaires, sociales, mais aussi leur mode de justification, ont produit une catégorie qui nous semble « aller de soi », celle de prostitution, écrit Véronique Guienne qui souligne qu'il s'agit là d'une construction dont la fabrication n'a rien de naturel (Guienne, 2006, 19).La prostitution -ou plutôt le contenu de cette catégorie qui peut sembler évidente, pour ne pas dire naturelle -soulève des débats qui se cristallisent notamment autour de l'opposition entre la demande de reconnaissance d'un statut de travailleur du sexe et celui de victime (Pryen, 1999), entre le postulat d'une liberté de se prostituer ou, au contraire, l'affirmation d'une contrainte structurelle invalidant la notion de choix (Mathieu, 2007). Ces discours, tour à tour populistes ou misérabilistes, tendent à escamoter un continuum par ses extrêmes : à un extrême la prostitution se trouve érigée en figure de la liberté sexuelle (Borrillo, 2002) et, à l'autre extrême, en figure emblématique de la victime ou, en négatif, la femme coupable de ne pas se reconnaître dans les discours de victimation (Gil, 2003)