La gouvernance différenciée des contrats locaux de santé

Abstract

Selon une sociologie politique considérant l’action publique comme une construction collective d’acteurs publics et privés en interaction, notre recherche se focalise sur la « nouvelle » gouvernance sanitaire des « territoires de santé » promue par les Agences régionales de santé (ARS) en s’intéressant aux modalités de fabrication des contrats locaux de santé (CLS). Dans la région étudiée, l’ARS lance, dès octobre 2010, les deux premiers CLS comme une forme d’expérimentation in vivo, avant leur future généralisation. A partir d’une analyse comparée des sept CLS signés en 2014, nos résultats montrent, d’une part, que leur gouvernance négociée donne lieu à d’importantes variations territoriales bien que domine une approche populationnelle légitimant l’action des élus locaux. D’autre part, via une enquête socio ethnographique de deux CLS en train de se faire, nous montrons que leur mode de négociation par l’ARS oscille entre deux logiques de gouvernance, descendante ou ascendante, « dure ou molle », et qu’un certain nombre de conditions favorables participent à la construction des accords et des compromis acceptables pour les diverses parties prenantes. Loin de prendre les formes d’une gouvernance « unifiée », fabriquer un CLS s’apparente davantage à faire du « sur mesure ». Les acteurs qui s’y engagent sont ainsi condamnés à s’entendre pour répondre, selon un jeu d’instrumentalisations réciproques, aussi bien aux problématiques « spécifiques » des territoires infrarégionaux qu’aux objectifs du Plan régional de santé

La fabrique du gouvernement métropolitain de la santé

“…Désormais, la fabrication et la mise en oeuvre de l'action publique de santé sont en partie définies « par le bas », le CLS établissant des formes de coopération qui en ignorent les frontières territoriales et sectorielles (Rolland, Pierru, 2013 ;Haschar-Noé et al, 2016). Regrettant que l'action locale demeure fortement fragmentée en raison de la persistance du principe des blocs de compétences, les représentants de l'ARS Aquitaine invoquent le niveau supra communal comme « optimum dimensionnel » (Offner, 2006) en matière d'opérationnalisation et de contractualisation.…”

“…Les représentants de l'ARS ont ici besoin de la collaboration des élus locaux afin de faciliter la déclinaison des objectifs de leur PRS qui reste dépendante de leurs décisions (Loncle, 2009). En la matière, l'étude des usages et effets de ces contrats en Midi-Pyrénées donne à voir une forte différenciation territoriale des arrangements institutionnels à l'oeuvre en raison des rapports de force qui les structurent (Haschar-Noé et al, 2016). En Aquitaine également, l'incertitude relative aux ressources financières que les collectivités sont susceptibles d'obtenir dans ce cadre introduit, dans les échanges, des résistances et partant, une structure de pouvoir défavorable à l'agence (Honta, Basson, 2015).…”

“…Dans la mesure où le territoire fonctionnel que les acteurs municipaux considèrent pertinent pour traiter les questions sanitaires et sociales reste le quartier, leurs résistances à la dynamique de contractualisation engagée par la métropole et l'ARS recèlent le risque que s'autonomise, au sein des villes et de l'agglomération, un espace alternatif de régulation de la santé. La non-congruence entre ces diverses échelles territoriales engendre effectivement des rapports conjoncturellement tendus entre villes, ARS et métropole, une telle situation traduisant l'ambiguïté de la territorialisation dans ce secteur (Loncle, 2009 ;Honta, Haschar-Noé, 2011) et la peine qu'éprouvent les ARS à être reconnues comme chef de file légitime de la régulation en la matière (Rolland, Pierru, 2013 ;Haschar-Noé et al, 2016).…”

Collaboration of primary care and public health at the local level: observational descriptive study of French local health contracts

“…For instance, it creates an opportunity for local elected officials to claim legitimacy to intervene on health and display to their electorate their leadership on health and health-related (Salaméro and Haschar-Noé, 2017). For the above-mentioned local stakeholders relying on public subsidies to maintain their staff and activity, being involved in a local health contract may increase the likelihood of funding attribution through grant applications to the Regional Health Agencies (Haschar-Noé et al, 2015;Honta et al, 2018). For other partners such as gyms, it is a way to promote their business plan such as by agreeing on providing special services to individuals oriented by primary care providers or by organising community activities to promote healthy lifestyles.…”

“…For other partners such as gyms, it is a way to promote their business plan such as by agreeing on providing special services to individuals oriented by primary care providers or by organising community activities to promote healthy lifestyles. Some authors suggest that the more concrete, aligned with regional priorities, and supported by local actors' local plans are, the more likely they will attract funding from Regional Health Agencies (Haschar-Noé et al, 2015;Salaméro and Haschar-Noé, 2017).…”