Résumé L'idée a longtemps prévalu que l'anxiété avait sur l'excitation sexuelle un effet essentiellement inhibiteur. Au cours des dernières décennies, des recherches utilisant des techniques pléthysmographiques ont démontré qu'il n'en allait pas toujours de la sorte. Selon les conditions, l'anxiété peut avoir un impact inhibiteur, neutre ou facilitant. L'articulation de ces données de recherche à des modèles et concepts développés par ailleurs dans le champ de la psychologie cognitive permet de proposer une théorie cohérente des relations anxiété-excitation. On peut l'énoncer en plusieurs points : l'effet inhibiteur de l'anxiété sur le fonctionnement sexuel se doit largement à un phénomène d'interférence cognitive ; l'attention du sujet se porte sur des signaux de danger au détriment des stimuli érotiques. Dans ce cas, la mémoire de travail du sujet est saturée par des signaux de danger, les ressources cognitives indispensables au traitement des stimuli érotiques s'en trouvent réduites avec pour conséquence une altération de ses réactions sexuelles. Une structure cognitive et émotionnelle nommée érotophobie prédisposerait à ce processus. En l'absence du vecteur d'interférence, l'anxiété aurait plutôt tendance à favoriser l'excitation, cela parce qu'elle accroît l'attention allouée aux stimuli érotiques et/ou parce que les corrélats psychophysiologiques de l'anxiété sont interprétés comme ayant une origine sexuelle. Author's personal copy . Moins spectaculairement, on relève aussi que de nombreuses personnes se disent parfois sexuellement stimulées par le stress, la crainte d'être surpris par exemple. Bref la relation anxiété-excitation semble plus complexe que ne le supposait la théorie initiale de l'incompatibilité. Au cours des deux dernières décennies, la compréhension de l'influence du stress sur l'excitation sexuelle a considérablement évolué. On est passé d'une théorie centrée sur une influence inhibitrice et des mécanismes physiologiques périphériques à une théorie insistant davantage sur la complexité des relations entre les deux états et sur des explicateurs cognitifs. Cette évolution se doit largement à l'essor des techniques pléthysmographiques et au développement concomitant de modèles généraux du fonctionnement cognitif humain.