Faire groupe au sein d’un groupe : la structuration des segments professionnels

« Old school new school ». Transformations des socialisations professionnelles chez les technicien∙ne∙s du spectacle en Suisse romande

“…La segmentation est une notion classique de la sociologie interactionniste des professions. Elle consiste en la division du groupe professionnel en plusieurs sous-groupes caractérisés par des positions et intérêts contradictoires (Hénaut & Poulard, 2018) 6. Ces trois gures constituent des idéaux-types, simpli cation des cas étudiés pour en synthétiser les caractéristiques saillantes (Schnapper, 2012).…”

Faire sa place au sein de la profession vétérinaire

“…Leur article est considéré comme l'un des plus représentatifs du dynamisme au sein des groupes professionnels et « parmi les plus féconds de la perspective interactionniste sur les groupes professionnels » (Dubar & Tripier, 2015, p. 113). L'approche interactionniste met en avant ainsi les « segments intra-professionnels » et vient s'opposer au paradigme fonctionnaliste de l'époque (Poulard & Hénaut, 2018a). Appréhender les groupes professionnels sous cet angle permet de se pencher sur la question des relations qu'entretiennent les segments professionnels entre eux, mais aussi sur l'impact sur le groupe professionnel en lui-même.…”

“…Les segments, loin d'être des entités statiques aux contours fixes, peuvent être définis comme des groupes qui portent des revendications professionnelles et identitaires (Poulard, 2020). En ce sens, ils peuvent être considérés comme des « mouvements sociaux » (Hénaut & Poulard, 2018a), au même titre que le conçoivent Rue Bucher et Anselm Strauss. Cela renvoie également à l'idée d'« identités collectives » au sein d'un même groupe (Brubaker, 2001).…”

“…C'est donc cette combinaison des deux aspects de « groupalité » et de « connexité » qui nous permet de désigner les vétérinaires homéopathes comme un sous-segment du groupe professionnel des vétérinaires. Les identifier comme un sous-segment professionnel, nous conduit à examiner les positions qu'ils occupent au sein de la profession, ainsi que les contours et la constitution de leur identité professionnelle (Champy, 2011 ;Hénaut & Poulard, 2018a, 2018b en partant de la caractéristique suivante : leur socialisation professionnelle initiale est celle des vétérinaires classiques et conventionnels, mais leurs parcours professionnels les ont conduits à s'inscrire au sein du segment des vétérinaires aux pratiques complémentaires et alternatives.…”

“…Aussi, d'autres pistes de réflexions complémentaires intéressantes, laissées à l'arrière-plan ou peu exploitées, seront esquissées dans la mesure où elles contribueraient à cerner encore mieux la place et les frontières du sous-segment telles que la valorisation de la pratique homéopathique auprès des éleveurs biologiques et peut-être dans un futur plus ou moins proche auprès des éleveurs conventionnels ; la concurrence ou la coalition avec d'autres professionnels alternatifs mieux reconnus ; et les relations avec les vétérinaires allopathes.Les vétérinaires, un sous-segment professionnel atypique ?L'étude des segments professionnels demeure une perspective d'analyse classique au sein de la sociologie des professions sous l'angle notamment de l'unité ou des divisions qui traversent un groupe professionnel et des luttes juridictionnelles auxquelles s'emploie tout segment d'une profession(Bucher & Strauss, 1961). L'analyse en termes de segment a retrouvé un nouvel élan en sociologie francophone avec les travaux de Florent Champy (2011a), puis ceux de Frédéric Poulard et LéonieHénaut (2018Hénaut ( , 2018a ou dans des études d'inspiration plus bourdieusienne, comme celle de Philippe Longchamp, Kévin Toffel, Félix Bühlmann et Amal Tawfik sur les infirmières en Suisse romande (2020). Ces luttes apparaissent comme un passage quasi obligatoire pour qu'un segment puisse trouver sa place, s'imposer face aux autres segments et obtenir les ressources suffisantes pour prendre des décisions professionnelles concernant plus globalement la profession.…”