Un certain nombre d'embryons développent leurs axes de polarité antéropostérieur, dorsoventral et médiola-téral grâce à des déterminants d'origine maternelle [1]. Grâce aux études menées chez l'ascidie et la drosophile, on a très tôt réalisé que certains de ces déter-minants étaient en fait de l'ARN et étaient localisés dans des régions précises de l'oeuf [1][2][3]. On connaît actuellement de nombreux ARN localisés, et cela dans la plupart des organismes modèles étudiés : levure, plantes, ascidie, drosophile, poisson-zèbre, xénope, poulet et mammifères [3].
Rôle de la localisation des ARNDans la plupart des cas, les ARN localisés sont codants, leur localisation permettant alors une synthèse locale de protéine [4]. Toutefois, et bien que ce soit exceptionel, il s'agit parfois d'ARN non codants, comme par exemple ceux que l'on retrouve dans le plasme polaire de nombreux embryons [5,6]. Il a été proposé que ces ARN non codants contrôlent l'expression d'ARNm, mais il est également possible qu'ils jouent un rôle structural, en permettant l'assemblage de structures cellulaires impliquées dans la polarité cellulaire, telles que le plasme polaire. Les ARNm codants et localisés sont nombreux et, suivant le type de protéines pour lesquels ils codent, sont impliqués dans des processus cellulaires variés.
Division cellulaire asymétriqueIl s'agit de la situation où une seule des deux cellulesfilles hérite de l'ARN localisé et adopte de ce fait un destin différent. On peut citer les ARNm Ash1 dans la levure [7] et prospero chez la drosophile [8]. Une application spécialisée de la division asymétrique est représentée par le cas des ARNm localisés dans les oeufs ou les embryons précoces, les plus connus étant bicoid, oskar et nanos chez la drosophile, Vg1 chez le xénope et macho chez l'ascidie [1,3]. Ces ARNm codent pour des déterminants du devenir cellulaire en agissant sur la transcription et la traduction, ou encore comme facteurs sécrétés.
Signalisation intercellulaireDans le blastocyste cellularisé de la drosophile, les cellules forment une monocouche entourant le vitellus et sont polarisées selon un axe apical-basal. De nombreux > La localisation de certains ARN dans des endroits précis du cytoplasme cellulaire a été découverte il y a une vingtaine d'années, à la fois dans l'embryon précoce d'ascidie, dans l'oeuf de drosophile et dans les fibroblastes embryonnaires de poulet. On connaît maintenant plus d'une centaine d'exemples d'ARN localisés, et cela dans de nombreuses espèces, de la levure à l'homme. Dans la plupart des cas, la localisation de ces ARN est liée à des événements de polarité cellulaire. À l'aide de deux exemples, l'ARNm Ash1 de la levure et les ARN rétroviraux murins, cet article aborde la fonction et les mécanismes de la localisation des ARN. On verra notamment que ce phénomène est impliqué dans de nombreux processus cellulaires et que le transport des ARN est intimement lié au cytosquelette et au trafic membranaire. <