inquiète de nombreux décideurs politiques européens et divers analystes depuis le début des années 2000, car elle est corrélée au retour au premier plan de la Russie dans les relations internationales. Moscou s'affirme à nouveau comme un pôle totalement indépendant et sûr de sa force dans les affaires mondiales et européennes (Rucker, 2003 ; Tinguy, 2008 ;Reljic, 2009). Dans ce contexte, l'internationalisation croissante des entreprises russes suscite la crainte du retour d'une forme d'impérialisme russe. Dans cette optique, Gazprom serait un bras armé du Kremlin et un instrument diplomatique, une sorte de vecteur d'influence dans les anciennes républiques soviétiques et dans l'Union européenne (Verluise, 2006).Cette approche, fondamentalement géopolitique, n'est pas dénuée de fondement mais on peut se demander si elle est suffisante. Les relations entre Gazprom et l'UE relèventelles uniquement de ce qu'Yves Lacoste appelle une situation géopolitique (Lacoste, 1993) ? L'entreprise Gazprom est-elle un acteur géopolitique ? Une volonté de domination se cache-t-elle derrière l'internationalisation de cette entreprise ? Plus généralement, existe-t-il une relation frontale entre une Union européenne qui se débattrait dans sa dépendance énergétique extérieure et une Russie qui pratiquerait une forme masquée d'impérialisme ? Dans cet article, on tentera de donner une réponse nuancée à ces questions. Premièrement, l'interprétation géopolitique des activités internationales de Gazprom et de la politique énergétique russe en général n'est justifiée que dans certain cas (Finon, Locatelli, 2006 ;Sébille-Lopez, 2006 ;Radvanyi, 2002). Deuxièmement, là où l'on voit de la géopolitique et une volonté de domination, il s'agit parfois plutôt de recherche de bénéfices et de rentabilité, dans une logique économique et industrielle.Les stratégies de Gazprom : un problème géopolitique ?