Parce qu’elles enjoignent l’individu à agir « comme s’il » était autonome, et ce, souvent en dépit de ses ancrages statutaires inégaux, l’effet des normes contemporaines peut s’avérer, aujourd’hui, beaucoup plus grand, même nuisible pour les individus qui tentent de « s’en sortir », voire de « sortir » d’une trajectoire dite de déviance et de marginalité. Dans cet ordre d’idées, nous allons proposer, dans cet article, une analyse de la prégnance de la nouvelle grammaire normative sur l’élaboration et le discours des politiques de réinsertion sociale des personnes incarcérées au Canada. L’analyse des plans et programmes d’action gouvernementale en matière de réinsertion sociale des ex-détenus montre en quoi le processus de retour dans la communauté, suite à une période d’incarcération, est représenté comme un moment idéal pour assujettir les individus à la nouvelle discipline « post-carcérale » visant, avant tout, l’autoredressement et l’adaptation aux règles contemporaines de conduites promues par la société, notamment l’autonomie, la prise d’initiatives et la responsabilisation de soi. À cet égard, nous avancerons l’idée que les priorités d’intervention telles qu’élaborées par les politiques sociales sont davantage la gestion du risque de récidive et la protection de la sécurité de la collectivité, que le bien-être et l’émancipation de la personne elle-même. Ainsi, il semble qu’on assiste davantage à une volonté de maintenir une apparence plus démocratique du système judiciaire que son application réelle.