Cas unique dans l'histoire contemporaine, au Japon la Seconde Guerre mondiale s'est achevée en même temps qu'avait lieu la décolonisation, en 1945. Ce phénomène est à l'origine de nouveaux discours sur l'unicité et l'homogénéité ethnique du peuplement de l'archipel. Le travail d'Oguma Eiji 1 a ainsi montré comment les représentations de l'identité nationale changèrent, dans les discours politiques et dans les sciences sociales, entre l'époque de l'empire colonial et la période postcoloniale. Du temps de l'empire colonial (1895-1945) en effet, l'anthropologie et l'archéologie avaient estimé que les Japonais étaient venus du continent asiatique. Elles avaient alors développé des modèles invasifs ou substitutifs et, dans ce cadre, les chercheurs de la Société d'anthropologie de Tōkyō (fondée en 1884) avaient conclu à une substitution du peuplement de l'archipel durant la Protohistoire. Après l'annexion de la Corée en 1910, les chercheurs des universités impériales de Tōkyō et de Kyōto considérèrent les Japonais comme un peuple métissé, composé à partir de plusieurs races issues de l'ensemble de l'Asie orientale. Au