Si l'on se réfère au rapport du Lancet par Julio Frenk et al. [1], datant déjà de 2010, la formation des professionnels en santé est en inadéquation avec les besoins de la pratique médico-soignante de demain ; cette dernière se dirigera dans nos pays industrialisés vers la prise en charge d'une population âgée et polymorbide, dont les soins seront essentiellement communautaires et domiciliaires et leur efficacité nécessitera d'acquérir obligatoirement des compétences collaboratives qui font totalement défaut dans les curriculums actuels. Outre l'orientation future des pratiques, la persistance d'une pédagogie en « silo » et le manque de résultats dans la sécurité des soins, rendent impératives le développement des compétences nécessaires aux pratiques collaboratives [2]. Enfin, il semble indispensable de s'attaquer aux représentations, valeurs et croyances au sein même des professionnels de santé [3,4], qui doivent être abordées précocement dans la formation. Afin de mener une réflexion pertinente, il s'agit de se référer à la littérature pour comprendre, d'une part les facteurs qui peuvent favoriser la mise en place de ce type de formation, et d'autre part l'impact que cette formation peut avoir. La dernière revue systématique de Reeves et al.[5] a colligé 46 études. Ce dernier a utilisé le modèle d'analyse de Biggs pour juger de la pertinence des dispositifs interprofessionnels, structuré en trois catégories : le contexte (Presage), les processus de mise en oeuvre (Process) et leur impact (Outcomes). Si les auteurs ont pu confirmer l'importance du contexte, comme le soutien institutionnel, la motivation des apprenants et des éducateurs à embrasser ces nouvelles formations, ils relèvent surtout dans les processus, l'utilisation d'outils pédagogiques tels que la simulation et particulièrement les dispositifs pratiquant la facilitation et le feed-back. En termes d'impact, la majorité des formations prégraduées ont montré une efficacité pédagogique comme la réaction positive des apprenants, la modification de leurs perceptions et attitudes, ainsi que l'acquisition de connaissances sur la pratique collaborative. Toutefois, ce ne sont que les formations interprofessionnelles au niveau postgradué ou continu qui ont montré quelques effets positifs sur les changements de comportement des professionnels voire des changements dans les pratiques ou le devenir de patients. Faut-il toutefois négliger ce développement et attendre des preuves tangibles ? À Genève, nous avons choisi d'implémenter une formation interprofessionnelle précoce sur la base de l'objectif suivant : amener les futurs professionnels de santé à bâtir et comprendre leur identité professionnelle propre tout en leur donnant une compréhension du rôle des autres dans l'équipe de soins. Sur la base du référentiel canadien du Canadian interprofessional health collaborative (CIHC) [6], les domaines de compétences travaillés sont notamment : la communication entre professionnels et avec le patient et ses proches, l'entraînement d'outils nécessaires au travail d'é...