Section 1. Introduction 1 L'évaluation des politiques publiques est un grand enjeu démocratique. Les dépenses publiques dépassent la moitié du PIB et la question de leur efficacité est centrale : les dépenses qui ne sont pas « efficaces » pour la collectivité, en un sens qu'il convient de définir avec soin, sont de facto un simple transfert de ressources vers des groupes constitués. Comprendre l'inefficacité d'une politique permet dès lors de rendre transparent le fait qu'il s'agisse d'un transfert de ressources. Pour ne prendre qu'un exemple, l'argument principal avancé en faveur des aides à la pierre est qu'elles favorisent le cycle économique (« quand le bâtiment va, tout va »). Mais l'efficacité de ces aides est rarement évaluée, a fortiori jamais comparée à l'usage alternatif des fonds publics, qui pourraient servir à alléger les charges et les impôts dans tous les secteurs ou à favoriser les investissements de long terme en éducation, ou en recherche et développement.Par ailleurs, des dépenses publiques qui ne contribuent pas à l'efficacité et dont le rendement propre est inférieur au taux d'intérêt augmentent la dette publique. Cette dette est passée aux générations futures et sa gestion est un des éléments du contrat intergénérationnel qui lie les différentes parties de la collectivité nationale : ces générations doivent donc connaître le rendement des dépenses publiques.Enfin, l'efficacité de la dépense publique dans un contexte de crise des dettes souveraines en Europe prend une nouvelle importance : lorsque des coupes budgétaires drastiques doivent avoir lieu comme dans certains pays sud-européens, l'idéal serait d'avoir assez d'information pour sanctuariser les dépenses dont le rapport coût bénéfice est le plus avantageux. Ces principes semblent aller de soi pour la plupart des chercheurs en sciences sociales mais se pose alors la question du choix de la méthodologie d'évaluation. Plus précisément, dans cette contribution, nous essaierons de répondre à la question : quelle est la nécessité d'éclairages multiples sur les politiques publiques par différentes disciplines au sein des sciences humaines, c'est-à-dire l'interdisciplinarité ? Faut-il aller jusqu'à un effacement des frontières disciplinaires dans le cas de la transdisciplinarité? 2 1 Ce texte est issu d'une présentation en session plénière au colloque Colloque Interdisciplinaire « Aménagement -Droit -Economie -Géographie -Sociologie -Statistiques » intitulé Territoires, Emploi et Politiques Publiques qui s'est tenu à l'Université de Metz les 23 et 24 juin 2011. L'article qui en est issu est un témoignage de gratitude envers Pierre Morin, ancien collègue de l'Université de Metz, qui m'a dès 2000 fait comprendre tout l'intérêt qu'il y avait à réunir les enseignements de différentes sources disciplinaires avec une grande ouverture d'esprit sans sacrifier jamais à la rigueur intellectuelle, réunissant en cela les qualités des deux types d'experts décrits dans l'ouvrage de P. E. Tetlock, sans en avoir les défauts. La plupart des idées discutées dan...