Analyse du basculement des modes d’extraction des eaux souterraines dans le Saïss (Maroc)

Making groundwater visible in Morocco: a historical process associated with irrigation development policies

“…Cependant, le pompage par motopompe, qui a commencé au début du XX e siècle avec l'installation des colons dans différentes régions du pays, a constitué une vraie rupture inaugurant leur exploitation massive. Célérier et Charton (1925) Un secteur de services s'est développé en soutien à cette nouvelle économie basée sur les eaux souterraines, comprenant le creusement et l'installation de puits et forages, l'approvisionnement en intrants (semences, engrais, produits phytosanitaires) et en matériel agricole et d'irrigation, le conseil agricole, et les marchés agricoles (Fofack et al, 2018). Ce secteur de services a accompagné et même stimulé l'expansion d'une véritable « économie des eaux souterraines » (Petit et al, 2017).…”

“…L'expertise en matière d'eau souterraine n'est donc pas l'apanage de l'État. Par exemple, les agriculteurs du Saïss se tournent vers des puisatiers du Souss et des foreurs, majoritairement syriens, reconnus pour leur expertise dans l'installation d'un puits ou forage fonctionnel, et disposant d'une connaissance fine des situations hydrogéologiques locales(Fofack et al, 2018). Les métaphores utilisées par ces acteurs permettent de donner du sens à leur recherche, à l'exploration et à l'exploitation « d'artères » souterraines susceptibles de fournir suffisamment d'eau à l'agriculteur.…”

Agir en commun pour un usage durable de l’eau agricole

“…Suivant le progrès technique et en fonction de leurs capacités et modes (individuels ou collectifs) d'investissement, les agriculteurs abandonnent progressivement les puits traditionnels prélevant dans des nappes alluviales ou peu profondes, pour mobiliser des aquifères plus profonds. Dans le cas du système aquifère du Saïss (Maroc), l'accès par forages à un aquifère profond s'est accéléré dans les années 2000 : il a permis l'abandon progressif des puits traditionnels qui imposaient une restriction d'accès du fait de la nature géologique de l'aquifère et des interactions entre puits voisins (Fofack et al, 2018). Dans la région des Niayes (Sénégal), on peut encore observer la concomitance d'une exploitation par puits traditionnels (avec systèmes de poulie) et une exploitation par motopompes.…”

“…Leur coût élevé implique que plusieurs familles s'associent pour les entreprendre, avec un accès à l'eau pour chacune proportionnel à son investissement, rappelant les tubewell companies dans l'État du Gujarat (Inde). La connaissance hydrogéologique a un rôle clé : les systèmes profonds sont moins bien connus et les risques de « forage sec » sont accrus, ce qui peut jouer dans la décision des irrigants, au vu de l'importance de l'investissement (Fofack et al, 2018).…”