L'article propose une étude de la pièce 4.48 Psychose de Sarah Kane dans une perspective queer. Le texte invente un langage de l'ambivalence : un langage qui transgresse les catégories binaires. Le corps de la comédienne s'installe dans un espace mental et symbolique où plusieurs voix s'enchevêtrent et s'hybrident; cet espace est ambivalent, entre la vie et la mort, entre le sublime et l'obscène. La liminalité ici devient un espacetemps propice à la réappropriation du corps par une écriture qui se substitue à la chair. This study of Sarah Kane's play 4.48 Psychosis puts forth in a queer perspective. The play sees the emergence, on stage and in text, of what Judith Butler refers to as "queer identity". Its text invents a language of ambivalence between voice and writing, between the masculine and the feminine: a language that transgresses binary categories. The body of the protagonist settles in a mental and symbolic space where several voices intertwine and hybridize; this space is ambivalent, between life and death, between the sublime and the obscene. The phase of liminality in which the piece unfolds becomes a space-time conducive to the reappropriation of the body by a writing that replaces the flesh. La pièce 4.48 Psychose de Sarah Kane, écrite en 1999, mais présentée pour la première fois une année et demie après le suicide de la dramaturge, met en scène un espace mental où les voix anonymes font part de leur impossibilité de vivre ainsi que de leur résolution à mourir. Composée d'une série d'instants qui retracent l'expérience intérieure d'une femme prise dans un espace oscillatoire, la pièce alterne monologues intérieurs et dialogues imaginaires avec l'alter ego de Kane. Dans cet article, il s'agira d'examiner les enjeux de l'ambivalence, qui est une dimension essentielle de la subversion de l'identité chez le sujet féminin dans la pensée et l'écriture de Kane. Comme la réflexion aboutit à la notion de subversion, la perspective queer sera favorisée avant toute autre. Ceci, parce que le queer, dans son fondement, est construit sur une ambivalence, voire une polyvalence, des identités genrées. L'ambivalence se manifeste dans la pièce de Kane par la remise en cause des catégories binaires du « masculin » et du « féminin ». Se pose la question suivante : dans quelle mesure 4.48 Psychose déstabilise-telle les catégories du genre et subvertit l'identité genrée du sujet? Cette subversion du genre est suggérée dès le début de la pièce par le discours du sujet d'énonciation :